Diderot J’ai toujours aimé les correspondances, les conversations, les pensées, tous les détails du caractère, des mœurs, de la biographie, en un mot, des grands écrivains ; surtout quand cette biographie comparée n’existe pas déjà rédigée par un autre, et qu’on a pour son propre compte à la construire, à la composer. […] Diderot, si diversement jugé, est de tous les hommes du xviiie siècle celui dont la personne résume le plus complétement l’insurrection philosophique avec ses caractères les plus larges et les plus contrastés. […] Sans nous prononcer entre ces deux compagnes de grands hommes, il paraît en effet que, bonne femme au fond, madame Diderot était d’un caractère tracassier, d’un esprit commun, d’une éducation vulgaire, incapable de comprendre son mari et de suffire à ses affections. […] Nous leur rappellerons en même temps, comme dédommagement et comme excuse, un article sur la prose du grand écrivain, inséré autrefois dans ce recueil par un des hommes93 qui ont le mieux soutenu et perpétué de nos jours la tradition de Diderot, pour la verve chaude et féconde, le génie facile, abondant, passionné, le charme sans fin des causeries et la bonté prodigue du caractère. […] La gêne et le besoin, une singulière facilité de caractère, une excessive prodigalité de vie et de conversation, la camaraderie encyclopédique et philosophique, tout cela soutira continuellement le plus métaphysicien et le plus artiste des génies de cette époque.