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475. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Mistral. Mirèio »

Indubitablement, selon moi, le caractère épique, si l’on veut bien y réfléchir, est quelque chose de plus intime qu’une question de plénitude, résolue avec plus ou moins de puissance, et il vient bien moins de ce que le poète chante que de sa manière de chanter. […] Et cependant, si le caractère distinctif du poète épique est de voir grand, de jeter sur la nature un de ces regards dans lesquels elle se peint plus grande qu’elle n’est réellement, en dehors de ce regard transfigurateur, il faut bien convenir que l’auteur de Mirèio a dans le talent quelque chose du poète épique, et son poème est là pour le prouver. […] Aussi en gardait-il entre les sourcils une balafre, — pareille à la nuée que la foudre déchire, — et les salicornes et les traînasses, de son sang ruisselant s’étaient teintes jadis. » IV Encore une fois, — ne nous lassons pas d’y revenir, — le caractère de cette poésie, divinement douce ou divinement sauvage, est le caractère le plus rare, le plus tombé en désuétude, dans les productions de ce temps.

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