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792. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

La presse bourgeoise, grisée par les louanges hyperboliques qu’elle jetait à pleines colonnes sur le mort, négligea de mettre en relief le côté représentatif de Victor Hugo, qui sera peut-être son titre le plus réel aux yeux de la postérité. […] Dans la préface des Voix intérieures de 1837, il avait pris pour devise : « Être de tous les partis par leurs côtés généreux, (c’est-à-dire qui rapportent) ; n’être d’aucun par leurs mauvais côtés (c’est-à-dire qui occasionnent des pertes). » Hugo a été un ami de l’ordre : il n’a jamais conspiré contre aucun gouvernement, celui de Napoléon III excepté, il les a tous acceptés et soutenus de sa plume et de sa parole et ne les a abandonnés que le lendemain de leur chute. […] « Je suis prêt, dit-il, dans sa profession de foi aux électeurs, à dévouer ma vie pour établir la République qui multipliera les chemins de fer… décuplera la valeur du sol… dissoudra l’émeute… fera de l’ordre, la loi des citoyens… grandira la France, conquerra le monde, sera en un mot le majestueux embrassement du genre humain sous le regard de Dieu satisfait. » Cette république est la bonne, la vraie, la république des affaires, qui présente « les côtés généreux » de sa devise de 1837. […] Il serait oiseux de discuter si dans un avenir prochain les œuvres de Victor Hugo vivront dans la mémoire des hommes, comme celles de Molière et de La Fontainec en France ; de Heine et de Goethe, en Allemagne ; de Shakespeare en Angleterre ; de Cervantès, en Espagne ; ou bien si elles dormiront d’un sommeil profond à côté des poèmes du Cavalier Marin, feuilletés avec lassitude, seulement par quelques érudits, étudiant les origines de la littérature classique. […] La célébration du centenaire de Victor Hugo, qui donne de l’actualité à cette étude, nous a suggéré l’idée de la republier : écrite le lendemain de sa mort, elle n’a pas encore perdu son originalité, le côté de la vie publique qu’elle expose n’ayant été ni discuté, ni analysé.

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