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517. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note I. De l’acquisition du langage chez les enfants et dans l’espèce humaine » pp. 357-395

Curiosité pure ; le besoin physique, la gourmandise n’y est pour rien ; il semble que déjà, dans son petit cerveau, chaque groupe de perceptions tende à se compléter, comme dans le cerveau d’un enfant qui se sert du langage. […] De plus, comme dans le cas précédent, le développement de l’articulation a manifesté la délicatesse innée de l’organisation mentale et morale. — Pendant les six premières semaines, les sons qu’il a proférés n’étaient que des cris, et très simples, cris de douleur, de malaise, de besoin, analogues à ceux qu’il jetait au moment même de sa naissance. […] Quand il avait acquis sur un objet un ordre de renseignements, il éprouvait le besoin d’acquérir un autre ordre de renseignements sur le même objet. […] Aussi longtemps que les hommes désignaient les moutons seulement comme des moutons, et les vaches seulement comme des vaches, ils pouvaient très bien indiquer les premiers par béé, et les secondes par mou-ou ; mais, quand pour la première fois ils éprouvèrent le besoin de parler d’un troupeau, ni béé ni mou-ou ne pouvaient servir. […] Mais quand on eut besoin d’un signe phonétique pour indiquer le chant d’oiseaux plus nombreux, ou peut-être de tous les oiseaux possibles, toute imitation d’une note spéciale devint non seulement inutile, mais dangereuse ; et rien ne pouvait conduire au nouveau but, sauf un compromis entre tous ces sons imitatifs, une usure, un frottement, un effilement de tous leurs angles aigus et distinctifs.

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