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47. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Monselet »

Or, si Monselet n’a pas les qualités essentielles du poète, il a (comme nous allons le voir tout à l’heure) beaucoup de celles du romancier et du conteur. […] Il nous citerait beaucoup de vers charmants et perdus, qui n’ont pu parvenir à faire des poètes de ceux qui les avaient écrits. […] Telle est la donnée que Monselet a cru faire accepter à l’Imagination moderne, cette grande dégoûtée, mais, au demeurant, la meilleure fille du monde ; tel est le pivot sur lequel il s’amuse à faire tourner, et quelquefois avec beaucoup de souplesse de grâce, les divers épisodes d’une composition qui est au roman ce que la comédie à tiroirs est à la comédie de caractère. […] Mais, tel que nous l’avons, avec ses défauts, sa manière, sa préciosité (Monselet s’est aussi comparé à Voiture), avec la fausseté de beaucoup de rapprochements qui ont trompé un œil qu’on ne trompera plus quand il sera attentif, et enfin les souvenirs d’études, les grandes herbes qu’a poussées le xviiie  siècle au milieu de tout cela, Monsieur de Cupidon, ce livre dont on peut trop dire encore ce qu’un critique exquis (Joubert) disait de Gil Blas : « On sent qu’il a été écrit au café, entre deux parties de dominos », Monsieur de Cupidon nous fait croire à un autre livre de Monselet qui établirait et fixerait sa renommée.

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