Et pourtant ce livre, attendu comme tout ce que fait encore son auteur, n’a pas produit l’effet que devaient certainement espérer son orgueil et le fanatisme de ses amis. […] Quand le premier volume de cet Homme qui rit a paru, j’ai dit combien je m’attendais à un de ces succès arrangés, préparés, organisés par les assassins de ce Vieux de la Montagne, qui essaient de venger leur grand bonhomme comme si on l’avait insulté quand on ose le regarder d’un œil ferme et qui ne tremble pas. […] Courbé, aplati, stupéfié sous l’ascendant de ces calomnies, le clergé, il faut bien le dire, a laissé imbécillement établir aux ennemis de l’Église — car ils l’ont établi — qu’Alexandre VI était la Trinité de l’inceste, de la fornication et de l’empoisonnement sur le trône pontifical de saint Pierre, et, chose inouïe et particulièrement lamentable ‘ il a fallu attendre jusqu’à ces derniers temps pour qu’un protestant — Roscoe — eût un doute sur ces monstruosités fabuleuses, pour que le doux Audin, qui n’était pas un prêtre, mais un laïque, s’inscrivît hardiment en faux contre elles, et pour que Rohrbacher, qui n’y croyait pas et qui les discuta en passant, avec une force de bon sens herculéenne, dans sa grande Histoire de l’Église, écrivît ce mot, qui sent la vieille épouvante, incorrigible, du prêtre : « Il faudrait, pour bien faire, qu’un protestant honnête homme allât jusqu’au fond de cette question d’Alexandre VI », — comme si ce n’était pas plutôt à un prêtre catholique que l’honneur d’un pareil sujet incombait ! […] Ce furent à leur tour les poètes du temps, comme Sannazar et Pontano, les Épigrammatistes et les Renaissants qui imitaient l’ordure antique, les Suétoniens qui voyaient partout des Césars et des vices à la façon romaine, et tous ces ennemis de l’Église qui n’attendaient que Luther pour se faire protestants.