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2797. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLe entretien. Littérature villageoise. Apparition d’un poème épique en Provence » pp. 233-312

Nous ne sommes pas fanatique cependant de la soi-disant démocratie dans l’art ; nous ne croyons à la nature que quand elle est cultivée par l’éducation ; nous n’avons jamais goûté avec un faux enthousiasme ces médiocrités rimées sur lesquelles des artisans dépaysés dans les lettres tentent trop souvent, sans génie ou sans outils, de faire extasier leur siècle ; excepté Jasmin, un grand épique, mais qui a trop bu l’eau de la Garonne au lieu de l’eau du Mélès ; excepté Reboul, de Nîmes, qui est né classique et qui semble avoir été baptisé dans l’eau du Jourdain, le fleuve des prophètes, au lieu du Rhône, le fleuve des trouvères, nous n’avons vu, en général, que des avortements dans cette poésie des ateliers. […] c’est que nous sommes l’art et qu’ils sont la nature ; c’est que nous sommes métaphysiciens et qu’ils sont sensitifs ; c’est que notre poésie est retournée en dedans et que la leur est déployée en dehors ; c’est que nous nous contemplons nous-mêmes et qu’ils ne contemplent que Dieu dans son œuvre ; c’est que nous pensons entre des murs et qu’ils pensent dans la campagne ; c’est que nous procédons de la lampe et qu’ils procèdent du soleil.

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