Au moment où apparaissait, sur la guillotine, le condamné à mort, elle s’écrie : « Comme je me payerais cet homme ! […] * * * Mai Fantaisie écrite en chemin de fer, la nuit, en allant à Bordeaux. — Quand au bout, tout au bout de la voie ferrée, un œil rouge s’éveille et que la locomotive, dévorant l’espace, apparaît, du milieu de la colline, de grands ossements se dressent, s’ajustent et descendent lentement jusqu’à la barrière, formant une longue file de squelettes de vieux chevaux… Ils regardent lentement, de leurs orbites vides, la locomotive qui n’est plus qu’une étincelle de braise dans le lointain. […] Puis, quand le premier coq chante, la file remonte lentement la colline, et arrivé au sommet, le squelette de l’un après l’autre apparaît immense sur le ciel qui s’éclaire, puis le dernier de tous, le squelette du petit Conquiaud fait le saut périlleux derrière la colline. […] Elle me conta sa vie, mille choses tristes, sinistres, qu’elle coupait par un zut qui semblait boire des larmes… Il m’apparut dans cette peau de voyou, je ne sais quelle petite figure attristée, songeuse, rêveuse, dessinée sur l’envers d’une affiche de théâtre. […] J’étais dans la salle à manger, le soir d’un de mes mercredis, causant et buvant avec deux ou trois amis… La nuit finissait, l’aurore se leva à travers les petits rideaux, mais une aurore d’un sinistre jour boréal… Alors tout à coup beaucoup de gens se mirent à courir en rond dans la salle à manger, saisissant les objets d’art, et les portant au-dessus de leurs têtes, cassés en deux morceaux, entre autres, je me souviens, mon petit Chinois de Saxe… Il y avait aux murs, dans mon rêve, des claymores, des claymores immenses ; furieux j’en détachai une et portai un grand coup à un vieillard de la ronde… Sur ce coup, il vint à ce vieillard une autre tête, et derrière lui deux jeunes gens qui le suivaient, changèrent aussi de têtes, et apparurent tous les trois avec ces grosses têtes ridicules en carton, que mettent les pitres dans les cirques… Et je sentis que j’étais dans une maison de fous et j’avais de grandes angoisses… Devant moi se dressait une espèce de box où étaient entassés un tas de gens qui avaient des morceaux de la figure tout verts… Et un individu, qui était avec moi, me poussait pour me faire entrer de force avec eux… Soudain je me trouvai dans un grand salon, tout peint et tout chatoyant de couleurs étranges, où se trouvaient quelques hommes en habit de drap d’or, avec sur la tête des bonnets pointus comme des princes du Caucase… De là je pénétrai dans un salon Louis XV, d’une grandeur énorme, décoré de gigantesques glaces dans des cadres rocaille, avec une rangée tout autour de statues de marbre plus grandes que nature et d’une blancheur extraordinaire… Alors, dans ce salon vide, sans avoir eu à mon entrée la vision de personne, je mettais ma bouche sur la bouche d’une femme, mariai ma langue à sa langue… Alors de ce seul contact, il me venait une jouissance infinie, une jouissance comme si toute mon âme me montait aux lèvres et était aspirée et bue par cette femme… une femme effacée et vague comme serait la vapeur d’une femme de Prud’hon.