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1084. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

Si l’on me voit tant m’arrêter à ces plus anciens écrits de Mme de Staël, au livre de l’Influence des Passions, et bientôt à celui de la Littérature, c’est qu’à moi-même Mme de Staël m’est apparue pour la première fois par là ; c’est que je les ai lus, surtout l’Influence, non pas à vingt-cinq ans, comme elle le veut, mais plus tôt, à cet âge où tout est simple, rigoureux, en politique, en amour, et plein de solennelles résolutions ; où, en se croyant le plus infortuné des êtres, on rêve ardemment le progrès et la félicité du monde ; à cet âge, de plus en plus regretté, où l’excès des espérances confuses, des passions troublantes, se dissimule sous un stoïcisme qu’on croit éternel, et où l’on renonçait si aisément à tout, parce qu’on était à la veille de tout sentir. […] Benjamin Constant y apparaît, au contraire, dans la candeur du noviciat, enclin de sentiments vers les républicains modérés, vers ces mêmes patriotes qu’on lui peint dans le salon de Mme de Staël comme des âmes sanguinaires. […] Bientôt la publication de Corinne vint confirmer et redoubler pour Mme de Staël la rigueur du premier exil64 ; nous la trouvons rejetée à Coppet, où, après tout, elle nous apparaît dans sa vraie dignité, au centre de sa cour majestueuse. […] Janus ici lui-même apparaît mutilé ; Son front vers l’avenir n’a forme ni lumière, L’autre front seul regarde un passé désolé.

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