/ 1173
166. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

Hippocrate déjà, barbe peu galante, les avait appelées des animaux malades, mais Michelet a déterminé la maladie. […] Au lieu de cette grosse explication qu’on a appelée longtemps la Nature, et dont Joseph de Maistre, notre Voltaire, à nous autres chrétiens, s’est moqué avec une gaieté si peu piémontaise, Michelet a parlé « d’animaux se faisant eux-mêmes et se faisant par pièces et morceaux », ce qui serait plus fin, à la vérité, si Michelet, en toute matière, ne pressait pas toujours le ressort jusqu’à ce que le grotesque jaillisse. […] « Le crustacé s’entourait d’un squelette extérieur, — reprend Michelet, — le poisson se le fait au centre, sur l’axe où les nerfs, les muscles, tout organe viendra s’attacher. » Fantasque invention au rebours du bon sens, mais qui constitue le poisson, l’animal supérieur, la merveille ! […] Il racontait les animaux se faisant, et il devait les raconter sans forcer le trait, panthéiste, naturaliste, matérialiste, je ne sais quoi de confus mais d’adouci, de peu ambitieux, d’homme à son affaire, qui était de décrire, et d’amuser les petites filles sans qu’elles vissent un Dieu dans tout cela.

/ 1173