Les mots primitifs d’origine germanique sont encore dans le vocabulaire au nombre de plus de quatre cents ; on compte dans la même couche ancienne, mais tout à fait à la surface, une vingtaine de mots grecs importés par les Croisés, au xiiie siècle ; la langue française ayant à ce moment un grand pouvoir d’assimilation, leur origine est méconnaissable ; radicalement francisés, ils sont devenus chaland, chicane, gouffre, accabler, avanie. […] Il n’y a que des rapports vagues, purement métaphoriques, entre un grand nombre de mots français anciens et le mot latin dont ils sont la transposition populaire : de frigorem (froid) à frayeur, de rugitus (rugissement) à rut, ou de pedonem (piéton) à pion, de gurges (gouffre) à gorge, de marcare (marteler) à marcher, il y a si loin que la phonétique seule a pu identifier ces vocables divergents11.