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1755. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Balzac » pp. 17-61

Avec un geste de triomphe, il montre le ciel où il va monter par la mort et l’amour, et c’est ainsi que les paroles du conteur sont magnifiquement accomplies : « Au veu du geste et de la face brillante de cet homme de couraige, la connestable feut férue en plein dans le cueur. » C’est aussi dans ce Conte, où l’accent de Shakespeare alterne avec celui de Rabelais, que, sur les paroles du conteur, « l’espée des marys est un beau trespas de guallanterie, s’il y a de beaulx trespas », Doré en invente un de ce fantastique corporel qui est l’outrance d’une réalité gigantesque. Un jeune homme va se mettre à genoux, les mains jointes, aux pieds de sa dame de beauté, pour la requérir d’amour, quand une foudre de fer, l’épée du mari, vu à mi-corps dans l’ombre, s’abat sur le damoiseau et le fend, du haut en bas, comme le couteau d’un enfant partage une pomme. […] Il fallait être chrétien et chevaleresque (c’est tout un) pour écrire : Persévérance d’amour, Berthe la-repentie, et Le Frère d’armes, récits merveilleux et touchants, d’une inspiration entièrement étrangère au xixe  siècle : les plus divins morceaux du livre de Balzac. […] Balzac vaut bien pour le moins, pédanterie à part, la plupart de ces vieux manuscrits grecs qu’on retrouva au xve et au xvie  siècle, et qui furent imprimés, par les Lévy du temps, avec un respect, un amour, et presque une piété que les éditeurs n’ont plus guères !

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