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12. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Louis Wihl »

Ce ne sont que des braillards, ajouta-t-il avec mépris, tandis que vous, vous êtes un poète. […] Et la raillerie revenant, et le sourire aux lèvres de ce Léger incorrigible : — Vous qui êtes bien avec lui, ajouta-t-il, ne sauriez-vous me faire pardonner ? […] Merci… — ajouta affectueusement l’auteur des Reisebilder. […] Dans ce livre de vers qu’il a appelés Les Hirondelles, pour exprimer la fidélité au retour de la même pensée, il a été positivement le Voyant d’une patrie qui n’est plus, et, en pleine Allemagne du xixe  siècle, il a repris le chant, interrompu par plusieurs milliers d’années, des Hébreux exilés sur les bords des fleuves de Babylone ; seulement les exilés, à Babylone, avaient connu ce qu’ils chantaient et pressé sur leur cœur ce qu’on n’emporte point à la semelle de ses souliers ; tandis que lui, Wihl, l’exilé séculaire, à distance, dans le temps et dans l’espace, de cette patrie tuée et dont il n’a pas même vu le cadavre, a ajouté à la nostalgie fiévreuse de l’exil ce qui l’aurait diminuée s’il avait été moins poète : — l’envenimement de dix-huit siècles. […] — Les Hirondelles, Les Dieux scandinaves, La Reine de Madagascar, voilà le bagage poétique de Louis Wihl, auquel il faut ajouter le poème intitulé Le Mendiant pour la Pologne 36, et quelques poésies comme celle, par exemple, adressée à Victor Hugo… Ce n’est pas là un bagage immense dans ce temps de ballots et de quintaux littéraires, où nous sommes tous plus ou moins les portefaix de nos œuvres.

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