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449. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VI »

De ce principe que les choses ne sont qu’en tant que sensations, que rien n’existe si ce n’est des sensations, que la vie est une suite de sensations, de ce principe (évident, quelles que soient les métaphysiques, quelles que soient les théologies qu’on y joigne ou qu’on y insère) toute dialectique doit descendre ; l’homme, étant d’essence sensationnel, vivant de sensations, est nécessairement besogneux de sensations, et, besogneux de sensations, il veut les séries sensationnelles plus intenses ; or, une série sensationnelle sera plus intense si elle est plus homogène, c’est-à-dire si, parmi les sensations qui la composent, les sensations du même ordre logique admettent l’entremêlement d’un moins grand nombre de sensations d’un ordre logique différent. […] L’artiste spécial, pensant et disant ses sensations en son mode spécial d’art, ce ne sera pourtant pas le littérateur dégénérescent s’efforçant à donner avec des mots des images, avec des mots des musiques : folies qu’admet ou le virtuose tombé à la suprême décadence des impossibilités essayées, ou l’artiste dévié de sa voie naturelle et malgré soi y retournant. […] » à la musique, ainsi, il ajoutera l’auxiliaire du mot et du geste ; et, par le mot et le geste, il interprétera les significations trop hautement spirituelles ; et il satisfera au végétant, à l’Impur, au pervers, à l’accoutumé des faciles vies banales, et à l’ignorant qui est en nous ; sous le drame intérieur de l’âme, il fera un drame matériel ; il fera un drame ; mais ce drame, prétexte, concession, sera le secours à notre faiblesse ; c’est lui qui, repaissant la chair, laissera l’âme libre d’entendre son langage et d’admettre, librement, la poignance de ses motifs, et de subir le flux effroyable de cette vie idéale. […] L’anecdote du Parsifal étant en soi insignifiante, sera-t-elle donc admise comme symbole d’un drame humain — au même titre que le sujet d’un drame racinien est symbolique d’une action générale — et dans le Parsifal verra-t-on un drame, comme le Rheingold est un drame, comme Lohengrin, comme Fidelio, comme Alceste, un drame lyrique, un drame d’art complexe, un drame où des actions soient effectuées par des personnages imitant des types humains ?

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