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270. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Flourens, l’un des deux secrétaires perpétuels de l’Académie des sciences, a eu l’idée heureuse d’écrire avec quelque détail l’histoire de ses devanciers, non pas leur biographie, mais l’histoire de leurs travaux et de leurs vues. […] Il y a le Fontenelle bel esprit, coquet, pincé, damoiseau, fade auteur d’églogues et d’opéras, rédacteur du Mercure galant, en guerre ou en chicane avec les Racine, les Despréaux, les La Fontaine ; le Fontenelle loué par de Visé et flagellé par La Bruyère ; et à travers ce Fontenelle primitif, à l’esprit mince, au goût détestable, il y en a un autre qui s’annonce de bonne heure et se dégage lentement, patiemment, mais avec suite, fermeté et certitude ; le Fontenelle disciple de Descartes en liberté d’esprit et en étendue d’horizon, l’homme le plus dénué de toute idée préconçue, de toute prévention dans l’ordre de la pensée et dans les matières de l’entendement ; comprenant le monde moderne et l’instrument, en partie nouveau, de raisonnement exact et perfectionné qu’on y exige, s’en servant avec finesse, avec justesse et précision, y insinuant l’agrément qui fait pardonner la rigueur, et qui y réconcilie les moins sévères ; en un mot, il y a le Fontenelle, non plus des ruelles ni de l’Opéra, mais de l’Académie des sciences, le premier et le plus digne organe, de ces corps savants que lui-même a conçus dans toute leur grandeur et leur universalité quand il les a nommés les états généraux de la littérature et de l’intelligence. […] » Fontenelle avait quarante ans quand il fut nommé secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences (1697) ; il avait publié tous les ouvrages qui le distinguent sous sa première forme littéraire, et il va durer soixante années encore sous sa forme plus épurée, plus contenue, plus sérieuse : le grand esprit va désormais prendre le pas sur le bel esprit, ou du moins ne plus permettre qu’on l’en sépare. […]  » Fontenelle est le premier secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences qui ait écrit en français ; son prédécesseur Du Hamel écrivait encore en latin. […] Dans les deux préfaces qu’il a mises à l’Histoire de l’Académie des sciences (l’Histoire de 1699 et celle de 1666), il a atteint à une véritable perfection, encore agréable et presque sévère.

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