C’est la condition absolue de leur existence comme sciences exactes et capables de progrès. […] Je n’ignore pas que dans ces dernières années on a répété après Maine de Biran et Jouffroy « que l’âme se connaît, se saisit immédiatement. » Mais outre que ces psychologues ont dépensé vingt ou trente ans d’étude avant de découvrir cette connaissance immédiate (ce qui peut paraître assez surprenant), leur découverte ne semble pas nous avancer beaucoup ; car quand on a longtemps et scrupuleusement cherché ce que c’est que cette essence intime ainsi révélée, on n’arrive à trouver que les expressions vagues « d’activité absolue », « d’esprit pur en dehors du temps et de l’espace » : d’où l’on peut conclure que le plus net de notre connaissance consiste encore dans les phénomènes. […] La vie mentale a ses degrés et pour ainsi dire ses étages ; il n’y a pour les séparer que des limites vagues que la doctrine des facultés donne comme fixes et absolues. […] Si l’on prétend que le psychologue doit écarter toutes ces variations accidentelles pour arriver à la condition dernière et absolue de l’activité mentale, alors on transforme une étude concrète en une étude abstraite, on substitue une entité à une réalité ; on ressemble au zoologiste qui prendrait pour base de ses recherches le type idéal de l’animalité.