Il ne se doutait pas du talent qu’il avait, ni qu’il remplacerait Voltaire à l’Académie. […] Ces triomphes obscurs et journaliers sont plus méritoires que les grandes vertus, où l’on est soutenu par l’importance de la victoire et l’étendue même du sacrifice ; ces triomphes, mon ami, sont dignes de vous. » De loin, il cherche à le distraire en lui donnant des nouvelles du théâtre, des succès ou des chutes, — de l’arrivée de Voltaire, fêté, couronné, visité, qui vient de se rompre un petit vaisseau dans la poitrine et qui va succomber à son triomphe : « Bon Dieu ! […] Il l’interroge cependant sur Rousseau qui vient de se retirer à Ermenonville et que Deleyre fait dessein d’aller visiter : « Est-il vrai, comme on me l’assure, qu’il ait pleuré la mort de Voltaire, et qu’à la nouvelle du refus de sépulture, il ait eu un saignement de nez de colère et d’indignation ? Dites-moi ce qu’il y a de vrai… » Mais voilà Ducis, cet homme bon, naïf, tout cœur et tout âme, talent chaud et simple, lui qui n’a jamais parlé de sa vie à M. de Voltaire, et qui n’a été ni loué ni connu personnellement de lui, le voilà qui est choisi, sans brigue, pour remplacer Voltaire à l’Académie.