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246. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

Voltaire a soin d’amputer le caractère de son principal personnage des qualités qui pouvaient nuire à sa dignité. Henri IV, le Béarnais sceptique et narquois, l’adroit politique qui changeait de religion comme on change d’habits, l’homme qui appelait cela « faire le saut périlleux » et calculait que « Paris vaut bien une messe », a été par Voltaire transfiguré, je dirais presque défiguré, en héros dont la gravité ne se dément pas une minute. […] Voltaire s’emporte contre un critique anglais qui a osé blâmer les paroles d’Arcas à Agamemnon, au début d’Iphigénie : Avez-vous dans les airs entendu quelque bruit ? […] « Oui, Monsieur, s’écrie Voltaire, un soldat peut répondre ainsi dans un corps de garde, mais non pas sur le théâtre, devant les premières personnes d’une nation, qui s’expriment noblement et devant qui il faut s’exprimer de même. » En vertu de ce système, s’agit-il de rendre un détail familier, mais nécessaire ; vite la périphrase académique accourt à la rescousse. […] Si nous passons à l’épopée, Voltaire, dans la Henriade, s’épuise en tours de force semblables, quoique un peu moins malheureux, pour faire entendre, sans user des mots du langage courant, la messe et le mystère de l’Eucharistie.

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