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128. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Il goûte certes la gaieté italienne et le comique de Machiavel ; mais il ne trouve pas, comme Algarotti, qu’on puisse mettre sa Mandragore en comparaison avec les bonnes pièces de Molière « qui sont excellentes par toute l’Europe et des chefs-d’œuvre pour nous : En effet, s’écrie-t-il avec quelque chose de cet enthousiasme qu’il portait dans les Chambres du Vatican, quiconque, à jour et à jamais, voudra connaître à fond la nation française du siècle passé, n’aura qu’à lire Molière pour la savoir sur le bout du doigt ; aussi dans ma dispute avec Algarotti, lui soutins-je que nul homme n’était jamais allé aussi loin dans son art que Molière dans le sien, c’est-à-dire qu’il était encore plus grand comique qu’Homère n’était grand épique, que Corneille n’était grand tragique, que Raphaël n’était grand peintre, que César n’était grand capitaine. Là-dessus il m’arrêta en me disant que César entendait mieux le dénouement que Molière ; qu’il avait eu l’esprit de se faire tuer au moment du comble de sa gloire, dans le temps qu’il allait peut-être la risquer contre les Parthes, et qu’il était mort la montre à la main. […] C’est que Molière, lui aussi, est mort la montre à la main, au comble de sa gloire et sans déclin, après Le Misanthrope, le Tartuffe et Les Femmes savantes.

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