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1553. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

Le mot semblerait un peu fort ; et cependant, si son éloquence n’a jamais fait de plus grand progrès que dans le passage de sa première manière à la seconde, entre 1653 et 1658, — du Sermon sur la bonté et la rigueur de Dieu au Panégyrique de saint Paul, — comment s’empêcher d’observer que ce progrès coïncide justement avec la plus grande vogue des Lettres provinciales ? […] Si, par exemple, ils avaient besoin d’un Dieu qui leur fît des loisirs, — et comment, en un temps où l’on ne concevait pas l’idée qu’un écrivain pût vivre de sa plume, s’en seraient-ils passés ?  […] Il adoucit le dogme de la chute ; il adoucit la doctrine de la grâce ; il relègue Dieu loin du monde ; il soustrait à son intervention les affaires des hommes ; il a une façon d’interpréter le surnaturel qui n’en fait qu’une conformité plus lointaine aux lois de la nature ; et à tout cela les contemporains ne s’y sont pas trompés : ils ont reconnu le cartésianisme. […] « Il y a longtemps que Dieu m’a fait la grâce d’être assez peu sensible au bien et au mal qu’on peut dire de mes tragédies, et de ne me mettre en peine que du compte que j’aurai à lui en rendre quelque jour » : — Il se rapproche de Port-Royal ; — et c’est sans doute pour cette raison qu’il encourt la disgrâce du roi [Cf.  […] Malebranche. — Fénelon réfute le Traité de la nature et de la grâce. — Qu’ils en ont surtout à la théorie de l’action de Dieu par « les voies générales », — à l’abri de laquelle ils voient poindre la théorie de la « stabilité des lois de la nature » ; — c’est-à-dire la négation du surnaturel ; — et tomber du même coup la possibilité du miracle ; — la nécessité de la révélation ; — et l’utilité de la religion.

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