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253. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

La réponse, en ce qui concerne l’Inde, est obscure, lointaine, et suppose des recherches qui nous sont étrangères. […] dans le chant du Pæan, on reconnaissait dans ces termes étrangers à l’idiome grec l’alleluia des Hébreux. […] Si donc, lecteur qui parcourez ces pages par une étude de spéculation et de goût, vous ne voulez jamais oublier le côté sérieux des arts, ce qui touche à l’énergie de l’âme, à la passion du devoir et du sacrifice, à la liberté morale, même pour bien juger les grâces et la puissance du lyrisme hellénique, vous aimerez à réfléchir sur une beauté plus sévère : vous contemplerez cette originalité plus étrangère, plus lointaine pour nous, et cependant incorporée dans notre culte religieux et partout présente, que nous apporte la poésie des prophètes hébreux, de ces prophètes nommés par le Christ à côté de la loi, dont ils étaient, en effet, l’interprétation éclatante et figurée. […] Tel était donc, trois siècles avant les luttes de la Grèce contre l’Asie barbare, le degré de sublime où, devant les maux de la patrie juive et la chute espérée de son oppresseur, s’élevait la voix d’Isaïe, d’un homme de race sacerdotale et royale, de celui qui plus tard paya sa dette à la tyrannie, et, dans sa patrie délivrée du joug étranger, subit, sous un roi ingrat et féroce, le supplice d’être scié par le milieu du corps.

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