Le vieux Melchior, son bonnet de soie noire tiré sur ses larges oreilles poilues, les paupières flasques, le nez pincé dans ses grandes bésicles de corne et les lèvres serrées, ne pouvait s’empêcher de déposer sur l’établi sa loupe et son poinçon et de jeter quelquefois un regard vers l’auberge, surtout quand les grands coups de fouet des postillons à lourdes bottes, petite veste et perruque de chanvre tortillée sur la nuque, retentissaient dans les échos des remparts, annonçant quelque nouveau personnage. […] Je tirai les trente-cinq francs et je les posai sur l’établi. […] Goulden, seul dans sa chambre, qui lisait dans la gazette que le 3e corps avait plus donné que les autres ; il se promenait la tête penchée et s’asseyait bien tard à l’établi, tout rêveur. […] On ne voit que le pauvre apprenti de dix-huit ans, le bon horloger compatissant Goulden à son établi, la tante Grédel justement indignée, et la bonne nièce Catherine assise le dimanche sur la même chaise que son cousin Joseph, quatre cœurs où l’empire de 1813, ses victoires, sa gloire, et ses grandeurs retentissent dans un petit groupe de ce pauvre peuple et où tous les Te Deum se changent tout bas en larmes et en malédictions !