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489. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

En voulant empêcher ce mariage, elle devient la cause involontaire de la mort de Henri et, brisée par de si fortes émotions, meurt lentement d’une maladie de cœur. […] Mais il est peut-être vrai aussi qu’un roman doit être plus logique, plus lié, plus clair que la réalité, et que MM. de Goncourt se sont dispensés plus qu’il n’aurait fallu des règles les mieux fondées de la composition, de tout ce qui, dans une œuvre d’art, produit, pour employer leurs expressions « la tranquillité des lignes » et l’air de « santé courante », donne une impression de grandeur et de beauté, délivre de toute inquiétude l’émotion esthétique et mêle à l’admiration un sentiment de sécurité. […] Ce n’est plus la « douce terreur » et la « pitié charmante » dont parlait Boileau : c’est quelque chose de plus désolé et de plus poignant ; c’est ce que je voudrais appeler une émotion pessimiste, une compassion qui, par-delà les souffrances particulières, va à la grande misère humaine, une sensation des fatalités cruelles. […] Ajoutez qu’il ne reste peut-être plus que cet art violent pour nous donner les émotions dont nous avons besoin.

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