C’est le trait commun des Suisses qui ont écrit en français : on doit excepter Jean-Jacques, nature trop intérieure ; mais voyez Mme de Staël, Marc Monnier, M. […] Nous voici conduits au principe nouveau, large, fécond, dont Mme de Staël a voulu donner la démonstration par son livre, et qui contient tout le développement postérieur de la critique : « Je me suis proposé, dit-elle, d’examiner quelle est l’influence de la religion, des mœurs, des lois sur la littérature, et quelle est l’influence de la littérature sur la religion, les mœurs et les lois… Il me semble que l’on n’a pas suffisamment analysé les causes morales et politiques qui modifient l’esprit de la littérature… En observant les différences caractéristiques qui se trouvent entre les écrits des Italiens, des Anglais, des Allemands et des Français, j’ai cru pouvoir démontrer que les institutions politiques et religieuses avaient la plus grande part à ces diversités constantes. » Il semble qu’elle ne tienne pas trop, pour la poésie, à sa doctrine du progrès, et qu’elle se contente de constater des différences : si c’est sa pensée, la correction est heureuse. […] En 1805, elle est de retour à Coppet, où elle écrit Corinne, dont le succès est immense. […] Elle écrit son livre de l’Allemagne, dont toute l’édition française est détruite par la police impériale ; elle-même reçoit ordre de sortir du territoire français (1810). […] Elle écrit, au début de sa Littérature ces lignes funestes: « L’égalité politique, principe inhérent à toute constitution philosophique, ne peut subsister que si vous classez les différences d’éducation avec encore plus de soin que la féodalité n’en mettait dans ses distinctions arbitraires ».