L’éducation perpétue et renforce cette homogénéité en fixant d’avance dans l’âme de l’enfant les similitudes essentielles que suppose la vie collective. […] « Cette unité morale dont on regrette tant la perte, dit-il, n’a jamais existé que dans ces Utopies et ces Uchronies où nous sommes conviés de temps en temps à nous réfugier comme dans un asile pour y trouver un aliment à notre sentimentalisme et à notre rêverie. » Dans une société un peu complexe et évoluée, il ne peut pas plus y avoir d’unité morale véritable qu’il ne peut y avoir d’orthodoxie réelle, et pour la même raison qui est la diversité des esprits et des âmes. […] C’est pourquoi, le premier soin de toute individualité un peu originale, dès qu’elle reprend possession d’elle-même, est de faire table rase des pédagogies inculquées, de se remettre en présence de la vie, de recouvrer le sens de la réalité oblitéré par une vision conventionnelle des choses, en un mot, de refaire son âme.