Arroser le langage et le vivifier avec fraîcheur, cela demande des sources perpétuelles et pures ; ces sources, je le sais, on doit les chercher surtout en soi, dans son propre passé aux divers âges ; mais, du moment qu’on en demande au dehors, de quel côté se tourner de préférence à celui-là ? […] Jusqu’à l’autre extrémité des beaux âges de la littérature grecque, au lendemain même de Théocrite, on retrouverait des accents de cette simplicité touchante, ce naïf et ce fin qui pénètre comme en chaque veine de cette poésie au sortir d’Homère, et qui survécut longtemps, même après que le grand s’en fût retiré. […] Il est une fraîcheur qui tient à la source ; il est des images vives et légères qui tiennent aux impressions du berceau, et dont la trace se perpétue à travers les âges. […] Mais non : ces phases analogues et ces récidives du goût tiennent à des lois générales de l’esprit humain ; on réinvente, à de certains âges et en de certains lieux éloignés, les mêmes défauts, comme quelquefois aussi on rencontre, sans s’être connus et à l’aide de la seule nature, les mêmes beautés. […] Et, si l’on ne donnait les preuves textuelles, en croirait-on la Grèce capable à cet âge de pureté encore et de parfaite conservation ?