Une succession au trône régulièrement cimentée par des meurtres de famille, un gouvernement de sérail discipliné par la mort, à la moindre faute, au moindre revers, un trésor enrichi par les confiscations et le pillage, une armée de janissaires recrutés dans l’élite du sang chrétien pris et fanatisé dès l’enfance, puis cette autre armée de possesseurs turcs payant du service guerrier le domaine qui leur était échu, et défendant le sol comme une proie, tout cela rendait les armes ottomanes égales au moins à celles de l’Europe ; et, devant les divisions et les troubles des États chrétiens, elles semblaient supérieures. […] C’est ce pontife qui, dès la première menace des Turcs contre l’île de Chypre, sollicita vivement une ligue de quelques États chrétiens. […] Philippe II, en effet, impitoyable pour les débris de mahométisme épars encore dans ses États, hésitait à lutter contre la puissance des Turcs et surtout à défendre contre eux Venise, dont il enviait le riche commerce. […] C’était, sous le coup d’un vrai péril, l’élan spontané de quelques États chrétiens, pour couvrir l’Italie, en écarter l’esclavage, le meurtre et la peste, et, en rejetant les Turcs de l’Occident, effacer la dernière trace des invasions barbares.