PAULET, [Jean-Jacques] Docteur en Médecine de la Faculté de Paris & de celle de Montpellier, né à Anduse, dans le Bas-Languedoc, en 1740.
Ses Recherches historiques & physiques sur les maladies épizootiques, publiées par ordre du Gouvernement, ne sont pas de notre ressort, quoiqu’écrites d’un style qu’un homme de Lettres ne désavoueroit pas ; mais son Histoire de la petite vérole, en 2 vol. in-12, nous autorise à placer son nom parmi ceux de nos Littérateurs qui ont fait le plus noble usage de leurs lumieres & de leurs talens. Le but de cet Ouvrage est moins de repaître la curiosité du Public sur l’origine, les progrès & les effets de cette cruelle maladie, que de présenter les moyens d’en délivrer la Nation & l’Europe entiere. Telle est la fin louable que l’Auteur s’est proposée dans ses Recherches historiques. Pour y parvenir avec succès, il commence par établir & prouver que cette maladie est accidentelle, contagieuse, & non naturelle à l’homme ; qu’elle n’a point existé de tout temps, puisque les Médecins de l’antiquité n’en ont point parlé, & que ce n’est que vers le milieu du sixieme Siecle qu’elle a été apportée dans nos contrées, comme la peste & la lepre l’ont été plusieurs fois, sur-tout durant les croisades. M. Paulet fait voir ensuite l’analogie qu’il y a entre ces deux maladies & la premiere, toutes trois également étrangeres à nos climats, toutes trois contagieuses, qui se transmettent & s’étendent par la communication, & qui deviennent éternelles dans un pays, si l’on ne prend des mesures pour les faire cesser. Enfin il propose des moyens propres à délivrer la Nation de la petite vérole, & ces moyens different peu de ceux qu’on a employés pour chasser la peste de l’Europe. Les raisonnemens de l’Auteur, appuyés sur des faits incontestables, ont paru concluans à tous les esprits droits & sans préjugé ; & l’heureuse expérience que plusieurs villes, entre autres St. Omer & Dijon, ont faite des moyens qu’il propose, a mis le sceau à la démonstration de ses principes, & prouvé que non seulement la France, mais l’Europe entiere, peut se préserver de ce fléau, avec les précautions indiquées.
On sent qu’un Ouvrage de la nature de celui-là, qui contredit les idées reçues, & qui contient une doctrine si opposée à celle des Inoculateurs & à leurs intérêts, devoit nécessairement éprouver des contradictions, & susciter des ennemis à l’Auteur. Il s’y étoit attendu. Il savoit combien les illusions accréditées sont promptes à se révolter contre la voix qui les combat ; il n’ignoroit pas non plus de quoi l’esprit de parti est capable, lorsqu’il se voit contredit & humilié ; mais son zele n’en a point été effrayé. Il est vrai que si quelque chose pouvoit flatter son amour-propre & ajouter à la bonté de sa cause, ce seroit la maniere dont on a attaqué ses idées & combattu ses raisonnemens. Il s’étoit attendu à des critiques du moins spécieuses, & on n’a publié contre lui que des Libelles, où l’invective, le sarcasme, l’injure, & les traits de mauvaise foi, tiennent la place des raisons. Il ne faut pas s’en étonner : ce sont des Philosophes qui ont prôné & introduit l’inoculation parmi nous : c’étoit donc aux Philosophes à répondre à M. Paulet, & l’on sait que ce n’est jamais par les armes de la raison & de l’honnêteté que ces Messieurs répondent aux Ouvrages qui contredisent leurs opinions. Voyez l’Article Condorcet.