(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 419-420
/ 5837
(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 419-420

NONOTE, [Claude-Adrien] Abbé, né à Besançon en 1711.

On est dispensé de s’étendre sur le mérite de son Livre, intitulé, les Erreurs de M. de Voltaire. Cet Ouvrage a eu tant d’éditions, qu’il seroit difficile de le confondre avec les Ouvrages médiocres, quand il ne réuniroit pas, dans un degré éminent, une profonde connoissance de l’Histoire, un saine critique, la clarté & la vigueur du style, à un ton de modération & d’honnêteté qui le met bien au dessus de l’Essai de l’Histoire générale, dont il a relevé supérieurement les bévues, confondu les impostures, & réfuté les impiétés. L’Historien n’y a répondu que par des injures ; ce qui prouve que la raison n’est pas de son côté.

A l’excellent Livre dont nous venons de parler, M. l’Abbé Nonote en a fait succéder un autre également estimable & dans son motif & dans la maniere dont il est traité ; tel est le Dictionnaire anti-philosophique. Cet Auteur devoit s’attendre à de nouvelles injures ; elles ne lui ont pas manqué. Il paroîtra toujours étrange que la Philosophie ne craigne pas de se dégrader ainsi, pour défendre les prétendues lumieres qu’elle s’obstine à répandre, malgré le peu d’accueil qu’on leur fait, & les tristes effets qu’elles produisent. M. de Voltaire, entre autres, qui se glorifioit d’avoir planté l’arbre de la tolérance, ne s’est pas beaucoup empressé d’en goûter les fruits ; semblable en cela à ces Charlatans, qui ne font jamais usage des remedes qu’ils composent, & dont ils ne cessent de prôner l’excellence.

Une chose non moins singuliere, c’est que M. l’Abbé Nonote n’a recueilli de ses travaux que les injures qu’ils lui ont attirées de la part des ennemis de la Religion ; nous apprenons qu’il n’a ni bénéfice, ni pension ecclésiastique. On ne peut cependant se dissimuler qu’il n’ait rendu des services essentiels à la Religion & aux mœurs, en décréditant Voltaire, leur plus dangereux ennemi ; car de tous les Ouvrages publiés contre ce célebre Ecrivain, aucun n’a autant contribué, que le tableau de ses erreurs, à lui faire perdre l’espece d’autorité que ses talens lui avoient acquise sur l’opinion publique. Nous savons que M. l’Abbé Nonote n’a point écrit dans des vûes intéressées, & qu’il ne s’est jamais proposé d’autre but que l’utilité publique ; mais ce qui ajoute à son mérite, peut-il excuser les distributeurs des récompenses ecclésiastiques de l’avoir oublié ?