LXXX
élection d’alfred de vigny et de m. vitet a l’académie française.
Nous lisons dans un journal : L'Académie, dans sa séance particulière du jeudi 8 mai, a procédé au remplacement de MM. Étienne et Soumet. Le nombre des membres présents était de 34 ; — M. Guizot y assistait assez près de M. Villemain, et M. Thiers non loin de M. de Lamartine. Il n’y a pas eu de combat bien vif à l’Académie ce jour-là, malgré la présence de tous ces grands rivaux ; on paraissait s’être entendu pour porter d’abord M. Alfred de Vigny, qui a passé au premier tour de scrutin, dédommagement bien dû après une si longue attente. M. Vitet a été nommé ensuite presque aussi aisément. La poésie et les arts ont en eux deux représentants de plus ; décidément c’est l’heure de ce qu’on a longtemps appelé les jeunes générations ; elles arrivent, elles se casent, elles s’assoient. On aimerait à les voir suivies d’autres générations empressées et ardentes. Mais jusqu’à présent on cherche en vain, et l’espace se fait plus vaste chaque jour et plus vide.
Il ne serait pas très-beau que cela durât ainsi, et qu’on ne pût absolument plus dire des générations successives :
Et quasi cursores vitai lampada tradunt.
Le fait est que depuis bien du temps il n’y a pas beaucoup de vie et qu’on ne court pas. S'il y a foule et presse, c’est comme dans une rue ; il n’y a ni émulation ni mouvement comme dans une arène.