(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 456-458
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(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 456-458

Caures, [Jean des] Principal du Collége d’Amiens, né à Montreuil en Picardie, mort en 1586.

On trouve dans les Œuvres de cet Auteur, une Ode fanatique à la louange du massacre de la S. Barthelemi. L’Ouvrage est aussi détestable que le sujet qui a échauffé sa verve. Avant Malherbe on ne connoissoit pas les bonnes Odes, & depuis lui personne ne s’est avisé de chanter sur la lyre cet horrible événement.

Il y a des choses curieuses dans les Œuvres Morales de cet Auteur fanatique : entre autres choses, on y apprend un usage singulier parmi les femmes de son temps, la coutume de porter des miroirs attachés à leur ceinture. On ne sera peut-être pas fâché de voir la maniere dont l’Orateur s’éleve contre cet abus, & la tournure de style qu’il emploie pour le combattre. « * Sur ce propos, Mesdames, avons à vous demander, s’il vous est possible de complaire à Dieu & d’être sauvées à faire ce qu’il vous prohibe & défend ! Non véritablement : & faut, veuillez ou non, que vous desrorrillonniez, deschauvesourissiez, déretiez, c’est-à-dire, que ne portiez plus en aisles de chauvesouris ou en façon de retz, vos cheveux par lesquels soulez prendre diaboliquement & enfiler les hommes pour rassasier votre désordonné appétit, ou bien que vous soyez perdues & damnées……. par cette mondanité qui vous abuse, voire qui vous rend si laides & abominables à regarder ; que si vous saviez comme cela vous messied, vous y mettriez plutôt le feu que de les montrer par la mauvaise grace qu’ils vous donnent ; & pleust à la bonté de Dieu qu’il fust permis à toutes personnes d’appeler celles qui les portent, Paillardes & Putains, afin de les en corriger ! O Dieu ! hélas ! en quel malheureux regne sommes-nous tombés, de voir une telle dépravité sur la terre que nous voyons, jusques à porter en l’Eglise les miroirs du macule pendans sur le ventre ! Qu’on lise toutes les Histoires divines, humaines & profanes, il ne se trouvera point que les impudiques & les mérétrices les aient jamais portés en public, jusques à cejourd’hui que le Diable est déchaîné par la France ; ce qui est encore plus détestable devant Dieu & devant les hommes, que toutes les autres abominations ; & bien qu’il n’y ait que les Courtisannes (ou Dames de Cour) & Demoiselles qui en usent, si est-ce qu’avec le temps n’y trouvera Bourgeoise ni Chambriere qui par accoutumance n’en veuille porter ».