Brotier, [Gabriel] Abbé, ci-devant Jésuite, de l’Académie des Inscriptions & Belles-Lettres, né dans le Nivernois en 1723.
L’édition qu’il a donnée de Tacite, est la meilleure réfutation du sentiment de ceux qui prétendent qu’on ne sauroit bien écrire dans une langue morte ; non seulement elle offre la connoissance la plus profonde de la Langue Latine, mais encore l’imitation la plus heureuse du meilleur Historien qu’aient eu les Romains. L’accueil unanime qu’elle a reçu de tous les Savans de l’Europe, sera tout à la fois un anathême prononcé contre les Auteurs du paradoxe, & le triomphe de l’érudition parmi nous. Les excellentes notes qui accompagnent cette édition, ne seront jamais confondues avec le verbiage des Commentateurs ; elles seront regardées, au contraire, comme des modeles de sagacité, de discernement, de goût & de bonne latinité.
On doit à ce même Littérateur, dont la modestie égale le profond savoir, la plus correcte de toutes les éditions de Pline le Naturaliste. C’est le jugement qu’ont porté de son travail nos Savans & ceux des pays étrangers. L’habile Editeur a conféré les principaux Manuscrits, les plus rares & les meilleures éditions de Pline de la Bibliotheque du Roi & de plusieurs autres des pays étrangers, & a profité des notes que le docte M. Huet avoit écrites à la marge de la premiere édition de Pline, donnée par le P. Hardouin. Par le moyen de ces secours, réunis à la critique exercée, précise & toujours munie d’autorités ou de preuves, il est parvenu à purger le texte de l’Auteur d’environ deux milles fautes, & de le rendre le plus exact & le plus pur de tous ceux qu’on a donnés jusqu’à présent ; ce qui n’est pas d’un prix médiocre pour les véritables Gens de Lettres. Pour rendre son travail encore plus utile, M. l’Abbé Brotier l’a enrichi de plus de six mille notes, toutes nécessaires pour l’intelligence de l’Ecrivain de l’ancienne Rome le plus rempli de difficultés par la nature de son Ouvrage. Malgré le goût du siecle pour les frivolités, il a rendu justice au mérite de ce savant Littérateur qui jouit de toute sa réputation. Et véritablement, à qui le Public accorderoit-il son estime, si ce n’est à ces hommes laborieux & assez modestes pour préférer les bons Ouvrages des Auteurs anciens, à ceux qu’ils pourroient donner eux-mêmes ? Ne méritent-ils pas en cela plus de reconnoissance que la plupart des Ecrivains de nos jours, qui ne se lassent point de grossir le nombre des productions médiocres ?