Bignicourt, [Simon de] ancien Conseiller au Présidial de Reims, sa patrie, né en 1709, mort à Paris en 1775.
La plus longue de ses Poésies, soit Latines, soit Françoises, n’a pas plus de vingt vers. C’est un mérite d’être court, & quand cet Auteur n’auroit que celui-là, on devroit lui en savoir gré. Il ne faut cependant pas réduire son éloge à celui de la briéveté ; plusieurs de ses Poésies Latines ont été comparées, par des Journalistes, à celles de Catulle ; nous ajouterons que la plupart de ses Epigrammes Françoises sont tout-à-fait dans le genre de celles du Chevalier de Cailli. Mais ce n’est pas sur ces bagatelles que M. de Bignicourt a fondé sa réputation.
Il s’est exercé dans un genre plus propre à lui faire un nom, & qui n’est pas moins agréable aux yeux de ceux qui connoissent le prix & le charme de la variété : ses Pensées & Réflexions philosophiques le placent à côté de nos Penseurs les plus fins & les plus délicats. Il en a donné, quelque temps avant sa mort, une nouvelle édition, augmentée de près des trois quarts, & intitulée, on ne sait trop pourquoi, l’Homme du Monde & l’Homme de Lettres. Quelques-unes des réflexions qu’il a ajoutées, manquent de justesse, & plusieurs ne sont pas assez développées. Cette maniere d’écrire par phrases, en prétendant donner une pensée, ne plaît qu’autant que ceux qui l’adoptent savent fixer quelque temps l’attention du Lecteur sur un même objet, c’est-à-dire, qu’il faut que, de pensée en pensée, ils développent un sujet, afin que les traits de lumiere suppléent au défaut de liaison dans le style. Les Maximes ou Réflexions de M. de la Rochefoucault ne seroient plus lues aujourd’hui, s’il se fût contenté de dire une vérité en peu de mots, sans en amener, par des tours différens, de nouvelles qui rendent la premiere plus sensible.