3. Bernard, [Pierre-Joseph] Garde des Livres du Cabinet du Roi à Choisy, né en Dauphiné, mort à Paris en 1775, nommé par excellence Gentil Bernard, pour les agrémens de ses petites Poésies. Il est celui de tous nos Poëtes qui paroît avoir le mieux réussi dans ce qu’on appelle le grand monde. L’esprit assaisonné par la délicatesse du sentiment, est toujours sûr de plaire. On ne doit donc pas s’étonner de la réputation qu’il s’est acquise à la Cour & à la Ville. L’Opéra de Castor & Pollux a encore contribué à augmenter sa célébrité. Ce Poëme est un vrai modele d’une Poésie ingénieuse & tendre, & très-propre à s’allier avec la Musique, & à lui fournir les moyens de déployer toutes ses richesses. Le plan en est finement conçu, l’intérêt vif, les scenes sont bien distribuées, les airs bien amenés, les sentimens aussi variés que naturels. Le Poëte a su y mettre en jeu, & toujours à propos, les différens ressorts du Théatre pour lequel il travailloit ; bien différent en cela de plusieurs Poëtes lyriques, qui n’ont pas craint de faire hurler la musique dans des vers durs & rocailleux, & de surcharger la scene d’un spectacle parasite, qui prouve le peu de ressource de leur génie.
M. Bernard est encore connu par un Poëme de l’Art d’aimer, dans le goût de celui d’Ovide. Ce Poëme a joui d’une grande réputation, pendant tout le temps que l’Auteur s’est borné à le lire dans les Sociétés ; mais depuis qu’il a été exposé au grand jour, le Public l’a mis au rang de ces Ouvrages dont les beautés de détails ne sont pas capables de racheter les défauts.