(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 203-204
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(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 203-204

1. Barbier d’ Aucour, [Jean] Avocat au Parlement de Paris, de l’Académie Françoise, né à Langres, mort en 1694.

Son Plaidoyer pour le Brun prouve tout à la fois son talent pour l’éloquence, & l’humanité de ses sentimens. Sa critique des Entretiens d’Ariste & d’Eugene annonce un esprit plein de finesse, de goût, & sur-tout de politesse : cet Ouvrage sera toujours un exemple à proposer aux Ecrivains de notre temps, qui manquent souvent de ces trois qualités, auxquelles ils substituent la jalousie, la mauvaise foi, & la grossiéreté.

D’Aucour épousa la fille de son Libraire, pour acquitter ses dettes envers lui. Il remplaça Mézeray à l’Académie Françoise, & eut pour successeur M. de Clermont-Tonnerre, Evêque de Noyon, qui dédaigna de le louer dans son Discours de Remercîment. M. l’Abbé de Caumartin, alors Directeur de l’Académie, répara cette omission dans sa réponse au Discours du Prélat ; & chaque louange qu’il donna au Récipiendaire, étoit un trait de satire ingénieusement lancé contre son orgueil.

L’Académie ne put s’empêcher de témoigner à M. de Noyon sa surprise de le voir manquer à un usage, jusqu’alors regardé comme indispensable. Le Prélat eut beau alléguer qu’il s’étoit fait une loi de ne louer jamais de Roturiers, on lui répondit que les Lettres n’admettent d’autre titre que les talens, & que la Roture, plus nombreuse à l’Académie que la Noblesse, pourroit en user de même à son égard & à celui de tous les Nobles aussi peu civils que lui. Il se rendit à ces raisons, & fit par écrit ce qu’il n’avoit pas voulu faire de vive voix : Barbier d’Aucour fut loué dans son Discours imprimé.

Tout le monde fait que M. de Clermont-Tonnerre est ce même Evêque de Noyon qui s’est rendu ridiculement célebre par son faste bruyant, par le galimatias de ses Sermons, par la singularité de ses Lettres Pastorales, & plus encore par sa vanité, qui ne lui permettoit, dit-on, d’appeler son Auditoire que Canaille Chrétienne. Au reste, il avoit de l’esprit & du savoir, qualités infiniment dépréciées par ses absurdes travers.