Abelle,[Gaspard] Prieur de Notre-Dame de la Merci ; de l’Académie Françoise, né à Riez en Provence, en 1648, mort à Paris en 1718.
On ne sauroit peut-être pas qu’il a fait des Pieces de Théatre, sans ce Vers :
Vous souvient-il, ma sœur, du feu Roi notre pere ?
auquel un plaisant du Parterre répondit :
Ma foi s’il m’en souvient, il ne m’en souvient guere.
ce qui fit tomber la Piece, qui seroit tout aussi bien tombée sans cela.
Ses autres Ouvrages, tous médiocres, & même au dessous du médiocre, sont restés dans l’oubli, & l’on a eu raison de dire dans son épitaphe :
Ci-gît un Auteur peu fêté,Qui crut aller tout droit à l’immortalité ;Mais sa gloire & son corps n’ont qu’une même biere ;Et lorsqu’Abeille on nommera,Dame Postérité dira :Ma foi s’il m’en souvient, il ne m’en souvient guere.
On n’avoit pas attendu sa mort pour faire des Epigrammes contre lui. En voici une qui n’a point été imprimée, & qu’on attribue à l’Auteur d’Athalie. Elle mérite d’être connue par l’originalité de ses rimes féminines, propres à donner une idée de la pesanteur de l’Auteur, & à prouver que l’Académie a été de tout temps un objet de plaisanterie.
Abeille, arrivant à Paris,D’abord pour vivre vous chantâtesQuelques Messes à juste prix ;Puis au Théatre vous lassâtesLes sifflets par vous renchéris ;Quelque temps après, fatigâtesDe Mars l’un des grands* favoris,Chez qui pourtant vous engraissâtes :Enfin, digne Aspirant, entrâtesChez les quarante Beaux-Esprits,Et sur eux-mêmes l’emportâtesA forger d’ennuyeux Ecrits.