(1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Fleury, Albert (1875-1911) »
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(1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Fleury, Albert (1875-1911) »

Fleury, Albert (1875-1911)

[Bibliographie]

Poèmes étranges (1894). — Les Évocations (1895). — Paroles vers Elle (1895). — Sur la route (1896). — Impressions grises (1897). — Pierrot (1898). — Poèmes (1895-1899, 1899). — Confidences (1900).

OPINIONS.

Maurice Le Blond

Ce que je préfère de beaucoup dans les Paroles vers Elle, c’est leur gaucherie exquise à la fois d’expression et de sentiment. Les madrigaux ne sont ni précieux ni fardés, comme il est coutume. Le poète a su balbutier. Ce n’est pas un aède qui chante, d’une voix sympathique, sur un rythme uniforme. Il a voulu devenir l’enfant qui souffre et qui tremble, fébrile et troublé de l’émoi d’une première passion. Et c’est tantôt une rêverie, tantôt un cri de passion inapaisé. C’est aussi cette élégie qu’il composa à cause d’une marguerite mal effeuillée et que j’aime pour sa naïveté exaspérée.

[Revue naturiste ().]

Edmond Pilon

C’est ainsi qu’est notre sort : nous nous éveillons héroïques ou triomphants, puis la vie vient et nous baise sur la bouche avec des fruits entre les dents ; nous connaissons l’amour au lieu des armes, et les airs pastoraux des flûtes, nous les rythmons dans nos caresses. Ce poète a su cela. De ses Évocations, souvent hautaines, il a passé aux simples chants de son bonheur. L’effigie de son Amie est délicate. Nous la pensons dédicatoire de beauté, et les lignes sont flexueuses et tendres, entre lesquelles il la limite. Les vers libres qu’il lui offre sont gauches quelquefois, émus souvent, exquis toujours, et des leitmotivs de sa passion nous gardons de doux murmures :

Rien qu’une fois, elle a passé dans le chemin,
Elle a chanté de charmantes caresses,
Elle a fait oublier l’ennui morne des heures.

Ainsi viennent de jeunes pâtres dont la voix est naturelle. Ils ne font plus de la peinture ni de la musique. Leur probité prononce l’éviction des autres arts de la poésie. Ils sont angéliques et graves. M. Fleury, qui est parmi eux, donne un exemple de leur candeur et de leur grâce.

[Mercure de France (mars ).]

Pierre Quillard

J’aime trop un livre pareil |pour insister sur quelques critiques de détail ; cependant il vaut mieux dire que certaines chansons sonnent trop exactement au diapason de Verlaine et que — mais si rarement ! — la langue défaille, soit dans le vocabulaire, soit dans sa syntaxe, en quelques formes barbares. Mais combien, en somme, M. Albert Fleury donne raison à ceux qui augurèrent beaucoup de ses œuvres antérieures, à M. Henri de Régnier notamment, qui, l’un des premiers, en discerna le charme, et combien je suis heureux d’avoir trouvé en un confrère de qui j’ignore tout, sauf ses vers, un aussi bon compagnon de pensée pour les heures tristes !

[Mercure de France (mars ).]

Georges Pioch

En intitulant : Confidences, son dernier livre de poèmes, M. Albert Fleury a prouvé qu’il discernait sûrement la valeur émotive de son art. Ce sont bien des confidences, en effet, ces poèmes où le rythme semble dérouler tout ce qui, dans la nature, souffre, s’effraie et s’atténue : l’automne et les suprêmes parfums passant dans le sillage des départs ailés ; les couchants dont des nuages en fuite pansent la gloire meurtrie ; les yeux stagnants des vieilles résignant, songe à songe, leur vie ; les vaisseaux que cerne la brume marine ; les pleurs que font tinter dans l’air les clochers exhalant l’Angélus ; — et la mélancolie du Désir, nostalgique et toujours inassouvi, qui supplante aux fins de l’étreinte la fougue lassée du déduit.

[Revue franco-allemande (25 mai ).]