(1863) Molière et la comédie italienne « Textes et documents » pp. 353-376
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(1863) Molière et la comédie italienne « Textes et documents » pp. 353-376

Textes et documents

I. — Page 60.

Les Gelosi ne sont pas sans doute, ainsi que nous l’avons dit, la première troupe d’artistes italiens qui visitèrent la France. À Lyon, d’abord, où il y avait une nombreuse et opulente colonie italienne, les comédiens d’Italie étaient accourus d’ancienne date ; tous les historiens décrivent notamment la magnifique représentation de La Calandra, qui eut lieu devant Henri II et Catherine de Médicis, en 1548. Nous avons cité la troupe de Ganassa, qui fit, à ce que l’on croit, connaître à Paris le premier Tabarino et le premier Pagliaccio. Les Comici Confidenti, avec leur célèbre actrice Maria Malloni detta Celia, étaient aussi venus en France un peu avant les Gelosi. Il suffit de se rappeler ce que dit Brantôme du goût de Catherine de Médicis pour les spectacles de la commedia dell’arte, pour qu’on ne doute pas que l’apparition des artistes italiens parmi nous dût suivre de près le mariage de cette princesse et devenir, dès lors, de plus en plus fréquente. Mais les troupes italiennes n’ont laissé que peu de traces sur notre sol jusqu’aux Gelosi. Ceux-ci, au contraire, y ont laissé des traces bien distinctes ; on possède sur eux un ensemble de renseignements qui permet de se rendre compte des représentations qu’ils donnaient. Le recueil de Flaminio Scala met sous nos yeux une partie de leur répertoire.

Voici la liste des cinquante canevas que contient ce recueil :

1. Li Due vecchi gemelli, comedia.

2. La Fortuna di Llavio.

3. La Fortunata Isabella.

4. Le Burle d’Isabella.

5. Flavio tradito.

6. Il Vecchio geloso.

7. La Creduta morta.

8. La Finta pazza.

9. Il Marito.

10. La Sposa.

11. Il Capitano.

12. Il Cavadente.

13. Il Dottor disperato.

14. Il Peregrino fido.

15. Lo Specchio.

16. Li Due capitani simili.

17. Li Tragici successi.

18. Li Tre fidi amici.

19. Li Due fidi notari.

20. Il Finto negromante.

21. Il Creduto morto.

22. Il Porta-lettere.

23. Il Finto Tofano.

24. La Gelosa Isabella.

25. Li Tappeti Alessandrini.

26. La Mancata fede.

27. Flavio finto negromante.

28. Il Fido amico.

29. Li Finti servi.

30. Il Pedante.

31. Li Due finti Zingani.

32. Li Quattro finti spiritati.

33. Il Finto cieco.

34. Le Disgrazie di Flavio.

35. Isabella astrologa.

36. La Caccia.

37. La Pazzia d’Isabella.

38. Il Ritratto.

39. Il Giusto castigo.

40. La Fortunata prencipessa, tragedia.

41, 42. Gli avvenimenti comici, pastorali e tragici, opera mista.

43. L’Alvida, opera regia.

44. Rosalba incantatrice, opera heroica.

45. L’Innocente Persiana, opera reale.

46, 47, 48. Dell’Orseida, opera reale, parte I, II, III.

49. L’Arbore incantato.

50. La Fortuna di Foresta, prencipessa di Moscou, opera regia.

II. — Page 75.

La dernière scène du Vecchio geloso revient sur l’aventure dont Pantalon a été la victime, et en tire le dénouement par un moyen des plus singuliers et des plus hardis :

« Pasqualina fuggendo da Gratiano il quai la vuole abbracciare, Burattino si pone in mezzo ; Pasqualina racconta come Gratiano gli ha tolto l’honore per forza ; Gratiano si scusa con dir’ d’esser stato tradito e che non puo parlare per all’hora, ma che ne fara vendetta. Burattino demanda à Pantaleone se, Gratiano havendo usato con sua moglie (Pasqualina), egli puo esser chiamato becco. Pantaleone dice di si. All’hora Burattino, udendo cio, dice : “Signor Pantaleone, sappia vostra signoria ch’io non son solo, ma che vi sono degli altri becchi, e non molto lontano : e di volerli raccontare quello che è intervenuto ad un suo conoscente ; e narra corne, ritrovandosi in villa un vecchio geloso con sua moglie, alla quale faceva vigilantissima guardia, avvenne che un giovane, che di lei innamorato viveva, ne sapendo come goderla, trovo modo, col mezzo d’un suo servitore, d’esser chiamato da un suo amico lontano da casa sua un qualche due miglia, e cosi presa licenza ando à nascondersi in casa d’una donna sua arnica, aspettando quivi l’occasione e l’ordine con la donna dato. Nacque in quel mentre voglia alle fanciulle della villa di voler ballare, e cosi fatta bellissima radunata di donne e d’huomini ballarini, cominciossi il ballo al suono di bonissimo stromento : e, ballatosi alquanto, la moglie del detto vecchio geloso finge col marito di volere un suo servitio fare, alle cui parole trovandosi presente la donna, che la casa al suo amante prestata haveva, con licenza del marito in casa sua la condusse. Et in bracchio dell’amante la pose : in tanto il buon vecchio, per la gelosia che della sua moglie haveva, alla porta si pose, et à tutti quelli che intrar volevano, à tutti diceva che à disturbar sua moglie non andassero, poich’ella un suo servitio faceva. Finito clie hebbe l’accorta moglie il suo amoroso lavoro, sene usci fuora di casa tutta suddata per la fatica che fatta haveva, e dal suo pietoso marito li fu detto che, quando mai piu li venissero simili voglie, che se le cavasse e non stesse à patiri, e asciugandole il sudore dal volto l’accarezzava.” Pantaleone, sentendo il fine cadere in suo pregiudicio, subito gridando dice d’esser tradito et assassinato da sua moglie. Oratio all’hora li dice che non lui, ma sua moglie esser l’assassinata, poichè egli godendola l’ha ritrovata donzella, e come egli l’assassinava non usando seco, per esser egli impotente. Pantaleone, vedendosi discoperto, confessa il vero, contentandosi che Isabella sia sua moglie, cosi si fanno le nozze d’Oratio con Isabella. »

III. — Page 104.

L’Emilia de Luigi Groto est une imitation de l’Epidicus. Elle fut publiée pour la première fois en 1579, et jouit d’une longue réputation. Il en parut une édition avec une traduction française en regard du texte italien, à Paris, chez Matthieu Guillemot, en 1609.

En voici le sujet en quelques mots : Chrisoforo (Epidicus de Plaute), valet de Polipo (Strattippoclès), jeune soldat, fils d’un père opulent, a été chargé par son maître, qui est allé au siège de Nicosie, en l’île de Chypre, d’acquérir par tous moyens Flavia, esclave d’un marchand d’esclaves nommé Arpago. La scène se passe à Constantinople. Chrisoforo sait que le père de son jeune maître, le vieillard Polidoro, maintenant veuf de son épouse légitime, a toujours une première femme et une fille qu’il a laissées autrefois à Nicosie, et que cette fille, nommée Emilia, doit bien avoir à présent une vingtaine d’années. Le valet n’imagine rien de mieux, pour exécuter l’ordre de son maître que de faire passer Flavia pour cette Emilia, et d’arracher au père qui n’a jamais vu sa fille l’argent nécessaire à la rançon de l’esclave. C’est ce qu’il fait, et il installe Flavia dans la prétendue maison paternelle.

Polipo revient du siège de Nicosie, mais il a oublié Flavia. Il aime une jeune fille qui, prise en Chypre, est emmenée en captivité. C’est celle-ci qu’il a promis de racheter, et pour laquelle il lui faut immédiatement de l’argent qu’il charge Chrisoforo de lui trouver.

Chrisoforo s’avise de persuader au vieillard que son fils est amoureux d’une courtisane, laquelle est aimée en même temps du capitaine Fracassa. Il lui propose de faire une bonne affaire en achetant la courtisane, qu’il reviendra, avec bénéfice, à Fracassa, et d’éloigner de la sorte celle qui est un danger pour son fils.

Toutes ces fourberies se découvrent. Lucida, la mère d’Emilia, arrive elle-même de Chypre. Polipo apprend que la captive est sa sœur. « Tu as acheté ma maîtresse sous couleur qu’elle fût ma sœur, dit-il à son valet, et j’ai acheté ma sœur croyant acheter une maîtresse. » Polipo revient donc à Flavia, qui lui a montré de la tendresse et du dévouement, et qui se trouve être la fille d’un voisin et ami de Polidoro. Emilia épouse un compagnon de Polipo, chez qui elle a été logée ; remarquez que cette héroïne ne paraît pas dans la pièce. Enfin Chrisoforo, malgré toutes ses fourberies, triomphe, et lui aussi se marie avec une suivante de Lucida ; Lucida devient la femme légitime du vieux Polidoro, ce qui ne fait pas moins de quatre mariages au dénouement.

Chrisoforo, comme Epidicus, est récompensé, au lieu d’être puni suivant ses mérites. On pourrait toutefois trouver que leur destinée n’est point la même, puisque Epidicus gagne par son astuce la liberté, et que Chrisoforo, au contraire, engage la sienne ; ce qui, aux yeux de quelques-uns, pourrait rétablir les droits de la morale qu’on a tant accusé Plaute d’avoir méconnus.

IV. — Page 141.

Voici la traduction que M. Ch. Magnin a faite des deux premiers sonnets du Teatro celeste de Giov.-Batt. Andreini.

Le premier est composé en l’honneur de Saint-Genest, qui devait bientôt être plus dignement célébré par la tragi-comédie de Rotrou :

« Tandis que Genest, sur la scène antique, mêle à la cythare d’or les accents des théâtres d’Orphée, les hommes attentifs semblent de marbre, et toutes les sirènes se taisent comme endormies.

« Mais au moment où, comme un dragon farouche, il va lancer sa morsure contre le baptême, Dieu émousse sur ses lèvres l’altière dérision, et, puissant correcteur, refrène sa témérité impie.

« Comme l’avide guerrier de Tarse, renversé de son cheval, se releva touché de repentir et ne désirant que la croix avec le Christ, ainsi Genest, au moment où il va se jouer du baptême, a reconnu son erreur véritable dans des eaux feintes. Tout dans le début était infernal ; tout est divin dans le dénouement. »

Le second sonnet est adressé à Saint-Sylvain, autre comédien converti :

« Scènes, quittez vos antiques honneurs ! Ne vous enorgueillissez plus de vos parures d’or, ni de vos pierres précieuses ! Les herbes recouvrent maintenant vos grandeurs ; votre antique beauté n’est plus qu’une horrible misère.

« L’éternité, cette incessante ouvrière, réserve ses trésors pour les théâtres du ciel. Là s’épanouit la fleur, là reverdissent les gazons ; là, pour musiciens, on a les chœurs des anges. C’est à la clarté de la lune et du soleil que le poète en trois personnes fournit le sujet sublime. Les spectateurs sont l’assemblée des bienheureux.

« Voyez-vous ce comédien qui tresse des palmes avec une pieuse et ineffable grâce, c’est Sylvain, le nouvel hôte des forêts du ciel (Selvano… selve). »

Le jeu de mots qui termine ce second sonnet est intraduisible.

V. — Page 170.

Nous pouvons donner une idée du talent poétique d’Aurelia. Elle mit le sonnet suivant au bas d’un portrait en vers, qu’elle adressait à la signora Isabella C…, qui peignait parfaitement et qui avait fait le portrait de la comédienne :

Voi col penello il mio ritratto fate,
Et io con la mia penna forme il vostro ;
Voi stemprate i colori et io l’inchiostro ;
Io carta adopro, e voi tela adoprate.

Voi mi pingete bella e mi adulate ;
Io non vi adulo e il vostro bel dimostro ;
Voi fingete di me l’avorio e l’ostro ;
Io non fingo di voi le glorie ornate.

Dunque cedete à me ne la disputa :
Io verdadiera sono, e voi mendace,
Ben che maggior di spirto e molto acuta.

Poësia è una pitlura ch’è loquace,
E se pittura è poësia ch’è muta :
Merta fede chi parla, e non chi tace.

VI. — Page 268.

EXTRAIT DES COMPTES DE LA COUR, POUR L’ANNÉE 1670.

État de la dépense faite pour la comédie-ballet intitulée Le Bourgeois gentilhomme, dansée à Chambord au mois d’octobre dernier, et pour la répétition faite à Saint-Germain au mois de novembre suivant64, auquel état est jointe la dépense de quelques comédies représentées à Versailles pendant ledit mois de novembre 1670.

livres. sous.
À Baraillon, tailleur… 5108 »
À Fortier, tailleur… 3571 »
Au sieur Lulli et à la demoiselle Hilaire, pour leurs habits… 900 »
Aux comédiens de la troupe du Palais-Royal, pour leurs habits… 4400 »
À Dufour, pour la fourniture des bas… 1177 »
À Detienges, pour la fourniture des rubans… 535 »
À la veuve Vaignard, pour masques, mannes, cadenas et autres ustensiles… 1835 »
À Ducreux, pour les perruques, barbes, etc… 687 »
À Rabache, pour six perruques de crin… 76 »
À Lenoir, plumassier, pour les plumes… 603 1
À Blanchard, pour les gants… 89 16
À Brécourt65, pour la fourniture des pierreries… 220 »
À Balard, imprimeur, pour les livres… 1022 »
Pour les escarpins des danseurs… 420 »
Pour les logements des danseurs, musiciens et concertants, pour la répétition du ballet de Chambord à Saint-Germain, et pour une nuit à Saint-Dier… 535 10
Pour toutes les nourritures, tant pour le voyage de Chambord que pour la répétition du ballet à Saint-Germain, et pour les comédies de l’Hôtel, à Versailles… 7916 10
(Dans lesquelles 7916 liv. 10 s. les comédiens du Palais-Royal, pour les nourritures et frais par eux faits, tant au voyage de Chambord qu’aux répétitions de Saint-Germain, entrent pour 3442 liv. 10 s.)
À Cordier, pour le pain, vin, verres, bois, viandes et fruits    2355 »
Pour la construction du théâtre fait à Chambord ; — parties et quittance du sieur de Vigarani… 3075 »
Pour toutes les planches, solives, chevrons et autres bois fournis à Chambord pour les logements des comédiens, musiciens, concertants ; pour une galerie pour habiller les danseurs, etc…. 1578 2
Pour toutes les serrures à fermer les loges… 70 »
À Sauvage, pour la menuiserie faite à Saint-Germain… 266 8
À Ducreux, pour fourniture de 80 aunes de toile pour boucher les fenêtres des musiciens, comédiens, etc., et autres frais… 180 3
À Paysan, pour la poudre, pommade, y compris ses peines, celles de ses garçons, et les frais de leur voyage à Chambord… 210 »
Pour toutes les voitures généralement quelconques… 9008 »
Pour trois bannes qui ont servi à couvrir les charrettes où étaient les habits… 50 8
Pour tous les Suisses qui ont servi, tant à Chambord qu’à Saint-Germain, à garder les portes du théâtre… 153 »
Au sieur de Lulli, pour ses copistes, leur entretien et nourriture, la somme de… 800 »
Pour les ports, rapports et entretiens d’instruments… 196 »
Pour les dessins et peines du sieur Gissez… 483 »
Pour les peines d’avertisseurs, huissiers et autres gens nécessaires… 300 »
Aux concierges de Chambord et de Saint-Germain, à raison de 100 liv. chacun… 200 »
Pour tous les menus frais imprévus, suivant le mémoire ci-attaché… 403 »
Somme totale du contenu au présent état… 49404 18

Nous, Louis-Marie d’Aumont de Rochebaron, duc et pair de France, premier gentilhomme de la chambre du roi, certifions avoir ordonné la dépense contenue au présent état, et l’avoir arrêtée pour Sa Majesté à la somme de quarante-neuf mille quatre cent quatre livres dix-huit sous.

 

À Paris, le………..février    1671.

 

Signé : le duc d’Aumont.

 

Enregistré au contrôle général de l’argenterie par moi, intendant et contrôleur général de ladite argenterie, et des menus plaisirs et affaires de la chambre de Sa Majesté, les jour et an de l’autre part.

 

Signé : Boileau.

VII. — Page 283.

Liste des canevas de Dominique analysés par Gueulette dans l’Histoire de l’ancien théâtre italien, et appartenant à la période antérieure à 1668 :

1. Le Dopie gelosie (la Double jalousie).

2. I Morti vivi (les Morts vivants).

Il existait sous ce titre une comédie de Sforza Oddi, l’auteur de La Prigione d’Amore, comédie qui fut imitée par Boursault. La pièce de ce dernier, Le Mort vivant, fut jouée à l’Hôtel de Bourgogne en avril 1662.

3. La Figlia disubediente (la Fille désobéissante).

4. Il Basilico di Bernagasso (Bernagasse, ou le Dragon de Moscovie).

Bernagasso demande la charité à coups de bâton ; quand on lui donne un quart d’écu, il répond qu’un quart d’écu est capable de le faire tomber dans le désordre, et qu’il n’a besoin que d’un sou.

Bernagasso fait des souhaits : « Que le ciel vous envoie une pluie abondante de tous biens ! » après chacun desquels Arlequin lui donne un sou. Arlequin l’engage comme domestique.

Bernagasso et la gouvernante refusent, l’un d’apporter du bois, l’autre de laver les plats, l’un de vider le baquet, etc., et viennent se plaindre l’un de l’autre à Arlequin, qui répond : « Allez, allez ; je le porterai, — je les laverai, — je le viderai. »

Bernagasso met en fuite Cintio et ses spadassins. Arlequin, pour le récompenser, lui donne sa nièce et lui cède, par acte notarié, sa maison ; Bernagasso lui donne des coups de bâton, et veut le mettre à la porte. Arlequin déchire l’acte, s’empare du bâton et met Bernagasso à la porte à son tour.

5. I Tre ladri scoperti (les Trois voleurs découverts).

On y remarque le rôle du capitan Spezzafer. « On prétend, dit Arlequin, que vous avez fait mentir le proverbe, qui dit que la chemise est plus proche de la chair que l’habit, en ne portant point de chemise. » Le capitan avoue que c’était autrefois sa coutume, parce qu’alors, comme il était extrêmement irritable, aussitôt qu’il se mettait en colère, le poil qu’il avait abondamment sur tout le corps, étant aussi velu qu’Hercule, se dressait, perçait sa chemise de toutes parts, et y faisait tant de trous, qu’on l’aurait prise pour une écumoire. Mais il ajoute que depuis quelque temps, s’étant fort modéré et ne craignant plus le même inconvénient, il porte du linge comme tous les autres.

6. Il Lunatico (le Lunatique).

7. Ohimè il cuore ! (le Cœur me fait mal).

8. Il Barone tedesco (le Baron allemand).

9. I Quattro Arlecchini (les Quatre Arlequins).

10. La Zerla (la Hotte).

11. Il Medicino volante (le Médecin volant).

12. I Tre Finti Turchi (les Trois feints Turcs).

13. Non vuol rivali amore (l’Amour ne veut point de rivaux).

14. I Due Arlecchini (les Deux Arlequins).

15. L’Innocente travagliata (l’Innocente persécutée).

16. I Tappeti (les Tapis).

17. Le Case svaligiate (les Maisons dévalisées).

18. Il Convitato di pietra (le Convive de pierre).

19. Arlecchino creduto principe (Arlequin cru prince).

20. Arlecchino ladro, sbirro e giudice (Arlequin larron, prévôt et juge).

21. L’Impegno d’un acaso (les Engagements du hasard), tiré de la pièce de Calderon, Croire ce qu’on ne voit pas et ne pas croire ce qu’on voit, où Douville a pris le sujet des Fausses Vérités.

22. Il Servo-padrone (le Maître-valet). C’est la même intrigue que celle de la pièce de Scarron.

 

À partir de 1668, nous voyons les pièces suivantes composées en France :

1. Il Regallo delle Damme (le Régal des Dames), 2 mai 1668.

2. Il Teatro senza commedie (le Théâtre sans comédie), par Cintio, juillet 1668.

3. Il Remedio à tutti mali (le Remède à tous maux), par Cintio, septembre 1668. On y remarque la chanson à boire, ayant pour refrain :

Toque, choque, toque,
      Choque bien
      Ton grand varre,
            Piarre,
      Contre le mien !

4. Le Metamorfosi d’Arlecchino (les Métamorphoses d’Arlequin), par Cintio, mars 1669.

5. Il Soldato per vendetta, o Arlecchino soldato in Candia (Soldat par vengeance, ou Arlequin soldat en Candie), par Cintio, mai 1669.

6. Il Mondo alla roversa (le Monde renversé), probablement de Cintio, juillet 1669. On peut comparer ce canevas avec Crispin rival de son maître, de Le Sage.

7. Il gentilhuomo campagnard, du Docteur Lolli, janvier 1670.

8. Arlecchino spirito folleto (Arlequin esprit follet), par Cintio, mars 1670.

9. Le Collier de perles, par M. Girardin, juillet 1672.

10. Arlecchino creato re per ventura (Arlequin roi par hasard), novembre 1672. On y apercevrait aujourd’hui des intentions satiriques passablement audacieuses.

11. Agiunta al Convitato di pietra (Adjonctions ou Additions au Convive de pierre), février 1673. C’est dans cette pièce que le gagiste Giraton créa le rôle de Pierrot, dont il resta en possession.

12. Arlequin soldat et bagage, juillet 1673. Il y a une grossière rédaction de cette pièce en vers français dans le Supplément du Théâtre italien, tome II, Bruxelles, 1697.

13. Le Baron de Fœneste, 10 janvier 1674.

14. Le Triomphe de la médecine, 14 mai 1674.

15. À fourbe, fourbe et demi, de Cintio, 18 octobre 1674.

 

Voici maintenant un certain, nombre de canevas qui ont date certaine entre cette dernière pièce, analysée par Gueulette, et l’époque où commence le Recueil de Gherardi.

La Propreté ridicule, en juillet 1678.

La Magie naturelle, ou la Magie sans magie, en décembre 1678.

Le Combat à cheval, comédie italienne, représentée à Fontainebleau le 18 mai 1680.

Eularia, muette par amour, représentée le 29 mai de la même année.

Les Quatre Scaramouches, représentée le 11 juin. C’était, sans doute, le pendant de la pièce des Quatre Arlequins, dont nous avons déjà parlé.

Le Deuil de Scaramouche et d’Arlequin, le 21 juin.

La Jalousie de Scaramouche et d’Arlequin, le 20 du même mois.

Les Juifs de Babylone, représentés le 1er juillet.

Arlequin, soldat déserteur, le 20 juillet66.

Arlequin, vendangeur, en décembre 1681.

Arlequin, valet étourdi, représenté à Saint-Germain-en-Laye le 2 avril 1682.

Arlequin, dogue d’Angleterre, le 7 avril.

La Maladie de Spezzafer, le 1er mai.

Arlequin tombé dans le puits, le 15 juin.

Le Deuil d’Arlequin, le 21 juin.

Arlequin, juif, peintre et tailleur, le 24 juin.

Arlequin, cabaretier, turc et capitaine espagnol, représenté le 30 juin67.

 

On peut constater, d’après les états des dépenses de la cour, que, pendant qu’elle séjournait à Saint-Germain, à Fontainebleau, il y avait comédie plusieurs fois la semaine, et que les Italiens à cette époque alternaient à peu près régulièrement, sur le théâtre de ces résidences royales, avec les troupes françaises ou avec la troupe française, quand il n’y en eut plus qu’une à partir du mois d’octobre 1680.

Le Recueil de Gherardi commence par le Mercure galant, de Fatouville, à la date du 22 janvier de l’année 1682, et finit avec Les Fées, de Dufresny et Biancolelli, au 2 mars 1697. C’est là ce qui constitue le répertoire authentique du Théâtre italien en France, jusqu’à la fin du dix-septième siècle. Un certain nombre d’autres pièces sont indiquées par Louis Riccoboni, dans la liste qu’il a placée en tête du Nouveau Théâtre italien, comme étant « très anciennes ». Cette désignation en fait probablement remonter l’origine avant la clôture de 1697 ; mais n’a rien que d’indéterminé en ce qui pourrait concerner Molière, car nous voyons Riccoboni l’appliquer aux pièces de Cintio (Romagnesi) et à quelques-unes de celles que nous venons d’énumérer en dernier lieu.

VIII. — Page 337.

Ce qu’on a dit relativement à La Fausse Prude reçoit quelque vraisemblance du caractère fort impertinent dont Angelo Costantini (Mezzetin) a donné plus d’une preuve. Il suffit de rappeler les aventures qu’il courut après la clôture du Théâtre italien. Costantini partit alors pour l’Allemagne où il reçut des propositions d’Auguste Ier, roi de Pologne, qui le chargea de recruter une troupe. Mezzetin s’acquitta si bien de cette mission que le roi le nomma camérier intime, trésorier des menus plaisirs, et l’anoblit. Mezzetin, enhardi par ces faveurs, s’éprit de la favorite du roi et lui déclara son amour. Il ne s’en tint pas là, il railla son protecteur et en fit la caricature grotesque devant cette favorite. Le roi avait été averti de l’insolence du comédien ; et, caché, il le vit insulter la Majesté Royale ; il sortit de sa cachette le sabre à la main, et voulait tuer le traître. Mais il s’arrêta, en songeant qu’une telle exécution était indigne de lui ; il le fit arrêter et conduire au château de Konigstein.

Pour avoir joué cette dangereuse comédie, Mezzetin resta vingt ans en prison. Au bout de ce temps, une autre dame de la cour d’Auguste, qui, à cette époque, avait du crédit sur le cœur et l’esprit du roi de Pologne, engagea ce prince à visiter sa prison d’État. Elle fit venir Costantini, qui parut « avec une barbe qu’il avait laissée croître depuis sa détention ». Il se jeta aux pieds du roi ; mais, bien que la dame joignît ses supplications aux siennes, Auguste demeura inexorable. Toutefois, cette dame travailla si bien l’esprit du roi que, quelques mois après, Costantini fut mis en liberté, à condition de sortir immédiatement des États du prince rancunier.

Mezzetin était vieux alors, « presque sexagénaire ». S’il avait réellement, dans La Fausse Prude, occasionné par des allusions plus ou moins piquantes la suppression de la troupe à laquelle il appartenait, son humeur agressive joua plus d’un mauvais tour à cet acteur.

Voici un trait de lui qui n’est que plaisant et spirituel : il appartient à la période de 1683 à 1697, où Mezzetin jouait à Paris ; il est ainsi raconté dans l’Histoire de l’ancien Théâtre italien :

« Mezzetin avait dédié une pièce à M. le duc de Saint-Aignan, qui payait généreusement les dédicaces. Dans le dessein de recevoir la récompense qu’il espérait, il se rendit un matin chez le duc ; mais le suisse, se doutant du sujet de sa visite, ne voulut point le laisser entrer. Mezzetin, pour le toucher, lui offrit le tiers de la récompense qu’il recevrait de son maître, et passa au moyen de cette promesse. Il rencontra sur l’escalier le premier laquais, qui ne fut pas moins intraitable que le suisse ; Mezzetin lui promit l’autre tiers, et il fut introduit dans l’appartement. Il y trouva le valet de chambre, qui se montra encore plus inflexible que les deux autres, et ne se relâcha que difficilement à la promesse du troisième tiers ; de sorte qu’il ne resta plus rien au pauvre Mezzetin qui, dès qu’il aperçut le duc, courut à lui et lui dit :

« — Ah ! monseigneur, voici une pièce de théâtre que je prends la liberté de vous présenter, et pour laquelle je vous prie de me faire donner cent coups de bâton.” Cette demande singulière étonna le duc, qui voulut en savoir la raison. “C’est, monseigneur, que, pour pouvoir approcher de votre personne, j’ai été obligé de promettre à votre suisse, à votre laquais et à votre valet de chambre, à chacun un tiers de ce que vous auriez la bonté de me donner.”

« Le duc fit une sévère réprimande à ses gens, et envoya cent louis à la femme de Mezzetin, qui n’avait rien promis. »