M. Jules Soury.
Jésus et les Évangiles
[I]
Il faut une certaine audace, n’est-il pas vrai ?… pour oser publier une Vie de Jésus après celles de Strauss et de M. Renan. Il semblait que l’on eût tout dit. Mais M. Soury a eu cette audace. Audace à bon marché, du reste ! Quand un homme se laisse rouler par le plus ignoble flot de la pensée contemporaine, et que, soutenu par elle, il nage là-dedans, ce n’est pas merveille d’héroïsme ; il est porté ! M. Soury a écrit un livre encore plus odieux que celui de M. Renan ; mais à quoi s’exposait-il en l’écrivant, ce héros ?… Aux applaudissements de la foule, cette honte recherchée… Il n’y a plus de Religion d’État pour châtier, comme il le faudrait, les écrivains qui, sous prétexte de critique, se livrent aux abominables et révoltantes conclusions d’un livre comme cette nouvelle Vie de Jésus, sortie évidemment de l’autre, et qui a pour ambition de la surpasser.
Et elle la surpasse. Il faut bien le dire : M. Renan est vaincu. Il a trouvé son maître. Nous sommes dans un temps où les maîtres, ce sont les valets ! La punition de M. Renan (mais je la trouve rude) est d’avoir engendré M. Soury. M. Renan — qu’on n’a plus besoin de caractériser — avait fait de N.-S. Jésus-Christ un homme comme lui, M. Renan, et auquel il avait eu la condescendance d’accorder quelque agrément, — qu’il n’a pas, lui, M. Renan, — ce qui, de sa part, était une générosité. Il en avait fait, ce Babin historique, un joli Rabbi pour les besoins d’attendrissement des femmes à qui il faut toujours une corde sentimentale à pincer, si on veut du succès, dans ce pays où la langue des femmes fait, de son petit bout rose, l’opinion. Mais M. Soury n’a pas ce raffinement. C’est un brutal et un cynique, comme un médecin. Est-il médecin ? Il en a l’air… Dans le doux Rabbi de M. Renan, M. Soury ne voit, lui, qu’un fou parfaitement caractérisé, délirant pendant tout le temps de sa mission sur la terre, et qui serait mort dans l’idiotisme absolu et la vie végétative, « si les juifs, MAL INSPIRÉS, avaient préféré voir mettre Barrabas en croix »
. (Il faut prévenir que ceci est textuel !)
Voilà le thème de M. Soury : la folie de Jésus, en attendant l’idiotisme !!! M. Renan, avec son Jésus-Christ inventé, propret, poupin, gentillet, papilloté, adonisé, en vue des petites femmes qui ont toujours besoin de poupées, n’est que le Girondin de la chose ; M. Soury en est le Montagnard, et même le Marat, ce chirurgien de chenil, qui, s’il s’en était mêlé, n’aurait pas manqué, comme M. Soury, d’expliquer le Sauveur des hommes par les plus hideuses et les plus déshonorantes maladies…
II
Je ne supposais pas — à distance — que M. Soury fût un philologue et que la gloire de M. Renan l’empêchât de dormir. Il en est un, cependant, à ce qu’il paraît, et il ne dort pas… malheureusement. Je savais qu’il écrivait à la Revue des Deux Mondes, ce qui n’est un honneur pour personne, et qu’il feuilletonisait à la République française. Dernièrement (si on se le rappelle), un travail de lui, insultant et faux, sur les filles de Louis XV, m’avait, dans un journal, passé par les mains, et je l’avais proprement et correctement déchiré en quatre morceaux, pour qu’il pût servir à quelque chose. Mais j’ignorais profondément que M. Soury eût travaillé dans la Bible, l’exégèse, l’archéologie, et c’est la couverture de son livre sur Jésus et sur les Évangiles qui m’a appris les souterrains travaux de taupe auxquels, depuis longtemps, il s’est livré. C’est aussi de ce livre de Jésus que, pour moi, la taupe est sortie. M. Soury, désespéré, sans doute, de voir ses autres travaux restés obscurs, a voulu percer son trou à travers le même sujet que M. Renan, dont la Vie de Jésus ne fut pas un simple trou, mais une immense trouée, par laquelle eût passé, de front, tout un régiment de Sourys ! Seulement, je crois bien que M. Soury s’est trompé d’heure. On a toujours raison d’arriver le premier. M. Renan avait mis la main sur le sujet le plus scandaleux qu’on pût toucher, dans un pays qui avait plus de quinze cents ans de Christianisme dans la poitrine et qu’il fallait en arracher ! Aussi, le cri poussé par ce Christianisme, quinze fois séculaire, fut-il terrible, et M. Renan, quand il arriva à la Vie des Apôtres, sentit bien que ce cri ne recommencerait pas… Il ne frappait alors que sur un tambour défoncé, qu’il avait crevé dès son premier coup de baguette. Le bruit fut mince. Cela ne retentit plus… La Vie de Jésus avait dévoré d’avance tout le scandale qui pouvait naître des Origines du Christianisme comme M. Renan les entendait, et voilà pourquoi, désappointé de n’avoir qu’un jour de gloire quand il en avait espéré plusieurs, il n’eût rien de mieux à faire qu’à rentrer dans sa petite fortification de fromage de Hollande qu’on appelle l’Institut, où M. Soury, qui est aussi un rongeur de textes, en attendant qu’il soit un rongeur de cet excellent fromage, voudrait bien se nicher au même prix.
Mais, à, présent, c’est plus difficile, et c’est précisé ment par la raison que, venu après M. Renan et sur les talons de son maître, qu’il vaut peut-être par le talent, — car les chiens valent souvent leurs maîtres, quand parfois ils ne valent pas plus, — M. Soury s’est cru tenu d’exagérer et de pousser au noir, comme disent les peintres, la tête rayonnante de notre Dieu, ne se contentant pas d’en faire platement un homme, comme M. Renan, mais allant jusqu’à en faire un fou, à qui la croix a porté le bonheur de ne pas mourir idiot ou crétin dans quelque cul de basse-fosse ou dans quelque hôpital de Jérusalem ! Et ce n’est pas là une folie comme celle dont Béranger, le petit bourgeoisaillon impie, a parlé en deux vers célèbres, — blasphème qui passe !
Sur la croix que son sang inonde,Un fou qui meurt nous lègue un Dieu !
Non ! la folie de M. Soury est quelque chose de plus arrêté, de plus réfléchi, de plus détaillé et de plus infect. J’en veux presque à ma plume de se tremper dans cette fange scientifique, physiologique, pathologique et médicale, et, certes ! je n’y toucherais pas s’il ne s’agissait de donner l’idée exacte du temps présent par une de ses publications, et si je ne voyais derrière M. Soury toute une légion d’honnêtes esprits,
qui vont se laisser imposer d’autant plus par le galimatias scientifique qu’ils sont incapables d’en comprendre un mot. Les Purgon et les Diafoirus du xixe
siècle n’ont pas rencontré le Molière qui doit les bafouer et les déshonorer dans l’avenir. C’est pour eux encore une heure de grâce ! Seulement, nous ne sommes plus au temps Où le bonus, bona, bonum, des Sganarelle, dit aux Géronte, qui ne savaient pas le latin, suffisait. Le bonus, bona, bonum, de M. Soury, c’est : « l’affection nerveuse, de nature d’abord congestive, puis inflammatoire ! c’est l’hypertrophie des cellules et des tubes nerveux ! c’est la vasculation cérébrale excessive ! c’est les vaisseaux turgides et gonflés de sang laissant transsuder des globules ! c’est la substance grise de l’encéphale tombant à l’état de détritus ! »
Tout cela pour expliquer que notre fille est muette et que Notre Seigneur était fou !! Franchement, ce serait bouffon si cela n’était pas dégoûtant, et on en rirait, si on n’en vomissait pas !
III
Telle est la répugnante originalité du livre que M. Soury publie, autorisé à cette infamie par le matérialisme universel qui nous ronge. Il y a dans ce livre, il est vrai, autre chose. Il y a des interprétations de textes, des recherches philologiques dont je ne suis pas juge, n’étant pas philologue, et dont je ne voudrais pas être juge, étant chrétien et catholique, et ne reconnaissant que l’Église et la Vulgate, — les seules autorités qui fassent taire ces disputes de mots et cesser toutes ces chiffes tirées entre pédants. Qu’importe ! au fond, du Renan ou du Strauss, rapetassé et remis à neuf ? Rabelais disait : « Matière de bréviaire ! » Je dis, moi : « Matière de dictionnaire ! » Mais la seule originalité, la seule chose neuve qu’il y ait dans le livre de M. Soury, c’est la folie de Notre-Seigneur, opposée, comme un argument, à sa divinité, avec une insolence tranquille. Voltaire lui-même, dans son temps, qui était le bon, n’avait pas trouvé cela. Voltaire n’a jamais dit que Jésus-Christ, qu’il se contentait d’appeler l’infâme, fût un fou, en marche vers l’idiotisme pur, et n’en a décrit la folie avec une exécrable volupté. Byron, dans un jour de gaieté spleenétique, a dit que ce monde était ; fait par le diable devenu fou. Il a dit : le Diable ; il n’a pas dit : Dieu ! Ceci était réservé à un écrivain du xixe siècle, — un animalcule d’écrivain, en comparaison de Byron et de Voltaire, — et, selon moi, pour qu’on dise cela hautement et avec impunité en plein xixe siècle, il faut que le siècle dans lequel on le dit soit aussi perdu d’esprit et aussi perverti que l’écrivain !
Perversité de peu, du reste ! La haine n’est pas tout.
L’écrivain est médiocre, le penseur vulgaire ; M. Soury n’a pas même l’originalité monstrueuse de son livre. Il n’a rien inventé de la théorie qu’il applique sans l’avoir faite ; son rôle est mesquin. Il a ramassé dans les livres des médecins modernes qui s’occupent de folie, une nosographie dont il outrage, à travers les siècles, Notre-Seigneur Jésus-Christ, comme s’il l’avait connu, pratiqué, ausculté dans son humanité pendant son passage ici-bas. Infatuation forcenée ! Il écrit ces horribles et grotesques paroles, qu’il faut citer, quoi qu’il en coûte, pour donner une idée du livre de M. Soury : « On
doit supposer que, parmi ses ascendants et ses collatéraux, Jésus avait des parents atteints de quelques affections du système nerveux central ou périphérique, des maniaques, des épileptiques, des suicidés ou des ivrognes. »
Pourquoi doit-on le supposer ?… Et plus bas : « Il fit fort bien de rester chaste comme un ascète. Sous une forme ou sous une autre, il eût transmis à ses enfants le mal qui l’a perdu, et ce Roi des Juifs, ainsi qu’il arrive d’ordinaire aux princes, aurait pu engendrer des idiots. »
C’est complet, n’est-ce pas ? de témérité, de fatuité, de ridicule impertinence. Tout y est, même la petite malhonnêteté pour les princes. Il est vrai que, cela dégorgé, M. Soury, qui sait se retourner et se mouvoir souplement dans l’inconséquence, évoque une autre théorie, fameuse jusqu’à ce qu’elle ne le soit plus, qui fait et, pour le moment, du génie, une folie relative, superbe à contempler dans Mahomet, Jeanne d’Arc, Socrate, Pascal, Newton, Spinosa, et, le croira-t-on après tout ce qu’il en a dit ? dans Jésus même, qu’il glisse parmi tous ces sublimes névropathes avec la lâcheté intellectuelle d’un homme qui a peur. Or, de quoi M. Soury peut-il avoir peur ? Ce n’est pas, dans ce temps de législation athée et désarmée, de la punition sociale qu’il mériterait bien ! C’est donc du crime de sa pensée. Ici, je reconnais ce que j’appelle : le signe Renan. Ce n’est pas le signe par lequel on doit vaincre, comme le Labarum de Constantin. C’est, au contraire, le signe de la contradiction, du doute et de la fuite. Par ce côté, M. Soury ressemble à M. Renan, dont l’âme a la mollasserie d’un doute continu dans laquelle il se dissout, flue et se dérobe. L’inconséquence de ces deux esprits est plus forte qu’eux. Dans un autre endroit de son livre, l’auteur de Jésus et les Évangiles, qui nie la divinité du Christ en raison abjecte de sa folie, reconnaît qu’il est thaumaturge, et s’il est thaumaturge, il fait des miracles, et s’il fait des miracles, nous voilà en plein monde surnaturel et bien près de la Divinité. Je ne crois pas que la débilité d’une tête pensante puisse descendre plus bas que dans ces ineptes aveux… M. Renan, devant lequel M. Soury tremble tout en le flattant, même quand il le discute, n’aurait pas dit mieux ou dit pis !
IV
Cependant, on est obligé de le reconnaître, malgré ces faiblesses de sceptiques embarrassés qui sont le fond des sciences humaines, M. Soury est plus affirmatif dans l’erreur que M. Renan. Il est affirmatif comme le mépris et comme la haine. Nous autres chrétiens, M. Soury nous fait l’honneur de nous haïr et de nous mépriser. Il hait et méprise tant le Christianisme, qu’il finit même par envelopper le Judaïsme dans sa haine et dans son mépris. Les Juifs pourtant devraient lui être chers ! Ils lui ont rendu un fier service, quoique le service n’ait pas infiniment servi… Ils lui ont tué Jésus-Christ, et avant de le tuer, ils l’ont couvert d’ignominies. Peut-on oublier ces choses-là ?… Ils ont été les exécuteurs des Hautes-Œuvres de la civilisation romaine contre le Christianisme, dans la personne de son divin chef, et ce déicide, qui ravit M. Soury, ils l’ont payé cher au Moyen Âge. Ils ont passé sous la lance implacable des chevaliers chrétiens, qui ont aimé Jésus-Christ comme il n’a jamais été aimé depuis eux, si ce n’est par des Saints, ces Exceptions du monde, ces Stylites, placés à distance les uns des autres dans ce « désert d’hommes » de l’humanité. Que de raisons, à ce qu’il semble, pour adorer le peuple qui a préféré Barrabas à Jésus-Christ ! Eh bien, non ! cela ne sera pas. Aux yeux de M. Soury, les Juifs ne vaudront pas mieux que les chrétiens. Savez-vous pourquoi ? Je vais vous le dire.
C’est que les Juifs ont été pendant des siècles le peuple de Dieu ! C’est qu’ils combattaient jusqu’à la mort l’idolâtrie ! C’est qu’après tout, ils sont nos ancêtres ! C’est que, sans eux, nous ne serions pas ! C’est que Jésus-Christ était juif et qu’il a été le Messie ! M. Soury est un Romain contre les Juifs et contre les chrétiens qui sont sortis des Juifs, et parce qu’ils sont sortis des Juifs et quoique le cordon ombilical qui unissait le Christianisme au Judaïsme ait été coupé par le plus épouvantable et le plus irrémissible des crimes. M. Soury est pour les Romains, contre les Juifs et contre les chrétiens. Il défend et il loue Néron. Il aurait allumé lui-même ces effroyables flambeaux vivants qui étaient des hommes, et il se promène à leur flamme dans l’Histoire avec un certain contentement de les voir flamber. Il dit d’eux : C’étaient, à l’égard de Rome, « des incendiaires de désir », et on leur rendait leur incendie de désir par des incendies en réalité. Si M. Soury avait vécu à cette époque, qui sait ? il aurait peut-être, volontairement et d’enthousiasme, été un des goujats pétroleurs de Néron. Il a innocenté Domitien. Il n’y a pas eu, dit-il, de persécutions ; il n’y a pas eu de supplices ; il y a eu des fêtes expiatoires. Il fallait bien sauver la civilisation romaine, qui était la civilisation du monde, contre le Christianisme, qui est la barbarie, l’ignorance, la sécheresse de tout, l’obscurité, la mort ! Ah ! quand on a dit dogmatiquement, au nom de la Science, que N.-S. Jésus-Christ n’était qu’un fou, réservé aux gâteux dans un temps qui aurait été court s’il n’avait pas été crucifié, rien n’est plus difficile à dire dans l’ordre du sophisme enragé et de la fureur démoniaque. On est entré, du premier pas, d’une telle roideur dans le fanatisme de la haine, qu’on ne peut s’avancer d’un degré de plus dans la frénésie à froid du mensonge et dans le souillement des choses sacrées… Avoir vécu vainement dix-huit cents ans de Christianisme et d’Histoire, pour se retrouver, à la fin de ce xixe siècle, qu’ils disent lumineux, de l’opinion de la canaille romaine et des plus atroces empereurs de cette canaille sur le compte des Juifs et des chrétiens, c’est encore moins fort d’absurdité et moins transcendant de sottise impudente, que d’avoir posé comme un fait scientifique et démontré la honteuse et humiliante folie du céleste Rédempteur du genre humain. M. Soury pouvait, à la vérité, faire avec autant de raison de Jésus un assassin et un adultère… Mais l’idée fixe du médecin aliéniste, affolé lui-même de la folie qu’il traite et qui est contagieuse, l’a emporté… Je ne sais pas si M. Soury est médecin, mais s’il ne l’est pas de fonction, il l’est toujours de préoccupation et de prétention pédantesques, et cette prétention et cette préoccupation commencèrent de poindre, il y a quelques années, comme une délicieuse aurore, dans ce charmant M. Soury, lorsqu’il nous fit l’histoire de Madame Louise de France, la fille de Louis XV, — cette rachitique qui ne l’était pas, — et dont il expliquait, quoiqu’elle fût une adorable femme d’esprit, la sainteté et la bêtise — deux faits, selon lui, congénères, — par le charriage d’un sang immonde et vicié à travers les plus pures veines qui aient jamais étendu leur réseau autour d’un corps virginal… Il procédait par les pustules chimériques de la religieuse Louise de France, pour arriver à la chimérique folie de son divin Maître. Esprit harmonieux ! la proportion était gardée…
Mais laissons ces insanités et ces fétidités nauséabondes. Elles ne mériteraient même pas d’être relevées, si le monde de cette heure du siècle avait encore assez de droiture dans le sens pour rester inflexible aux efforts d’un esprit faussé par la haine la plus volontaire, la plus réfléchie, la plus forgée à froid ; car M. Soury, cet animal à sang blanc dans le talent (pour parler comme lui), n’a pas à son service une particule de colère. On pourrait le laisser perdu, noyé, imperceptible, presque invisible, dans son coin de littérature et de société, il n’est pas si grand qu’on l’y aperçoive ! On l’y laisserait sans lui répondre, et même on ne l’entendrait pas. Mais il ne s’agit plus ici ni de M. Soury, ni de ses crachats imposteurs et blasphématoires sur la face de N.-S. Jésus-Christ. Ce qu’on entend maintenant, ce qu’il est impossible de ne pas entendre, c’est la grande voix de la Société moderne tout entière, qui passe de bien haut par-dessus cette tête de Soury, et qui, si elle ne dit pas les mêmes choses, identiquement les mêmes choses, — car chacun a sa spécialité d’injures quand il s’agit d’insulter le Christianisme, — dit des extravagances et des impiétés équivalentes, et, dans tous les cas, est disposée à tout entendre, à tout applaudir et à tout accepter. Que M. Soury soit effrontément matérialiste et païen, la belle affaire ! On peut très bien le laisser croupir, sans le remuer, dans son matérialisme purulent et dans son paganisme arriéré et stupide. Mais il est impossible de ne pas voir que la Société est comme lui, était avant lui, et serait encore sans lui, matérialiste et païenne. M. Soury n’est, en somme, qu’un des mille petits échos de cette grande voix. Il n’est la cause de rien, M. Soury, mais il est la conséquence de tout. À cette heure, il est évident que sans un coup de Providence qu’on n’a pas le droit d’espérer, la société chrétienne est morte. Ce petit homme-ci, qui se croit peut-être un scorpion, n’est qu’un ver de plus dans le cadavre. Mais c’est la corruption du cadavre qui fait les vers, et pour son compte, qu’il le sache bien ! il n’en est qu’un.