(1894) Propos de littérature « Appendice » pp. 141-143
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(1894) Propos de littérature « Appendice » pp. 141-143

Appendice

Si nous laissons de côté les quelques pièces subjectives de M. de Régnier et d’autre part les premiers écrits de M. Vielé-Griffin nous pouvons, ne fût-ce que pour nous distraire, résumer cette brochure par un petit tableau qui en montrera le dessin. Pour chacun de ces chapitres, — où elles m’ont servi d’exemple, — les œuvres de M. de Régnier s’inscrivent d’elles-mêmes dans la colonne de droite, celles de M. Vielé-Griffin dans la colonne de gauche.

PHILOSOPHIE ET MORALE
(Ch. I)
METHODE
(Ch. II)
Énergie Idée (object.) Symbole
Amour Fatalité Expression directe Allégorie
* * …………………… ……………
Optimisme Pessimisme Subjectivité Objectivité
Volonté (lutte) Résignation
Activité Contemplation
……………… ………………
Subjectivité Objectivité
FORME
(Ch. III et IV)
musique et technique
(Temps)
plastique
(Espace)
Rythme Harmonie Coloris Proportion lumineuse
Rythmes Mesure ………… ……………
Mouvement Stabilité Geste Attitude
(Activité) (Passivité) Élégance Noblesse
…………… ………… Mouvement Stabilité
Subjectivité Objectivité ………… …………
Temps (Espace) Subjectivité Objectivité
(Temps) Espace
TECHNIQUE ET PERSONNALITÉ
(Ch. IV et V)
M. Vielé-Griffin M. de Régnier
Invention Talent
Instinct, spontanéité Sens de l’équilibre
Poète Artiste
Naïveté (Artificialité)
Fluidité Rigidité
Inconsistance Fermeté plastique
Variété Homotonie
Mouvement Stabilité
Manière Impersonnalité (Flaubert)
Un style Le style
Subjectivité Objectivité
(Temps) (Espace)

Et encore cette petite table d’analogies :

MUSIQUE PLASTIQUE
Rythme
(mouvement)
Harmonie
(son)
Forme
(lignes)
Lumière
Les rythmes Mesures Timbres L’harmonie Geste (trait) Attitude Coloris Valeurss
TEMPS ESPACE

On remarque que chaque ordre dans la musique correspond à l’ordre de même rang et de même position dans la plastique ; ainsi Rythme à forme, Harmonie à lumière, valeurs à harmonie, rythmes libres à gestes, etc. Plus on se rapproche de la gauche, plus les phénomènes se manifestent en fonction directe du temps, plus aussi ils sont subjectifs ; plus on va vers la droite, plus ils participent exclusivement de l’espace, plus ils sont objectifs. Chacun pourra déduire, s’il le veut, la conclusion la plus probable des observations ici rassemblées.

Tel était le but de ce petit livre, — et de suggérer peut-être que, si nous percevons directement nos mouvements et notre fondamental rythme, (ce que, par un inconscient appel du futur, nous appelons notre être), l’harmonie demeure au fond de nous cachée et comme sommeillante et n’affirme point sa présence, sinon lorsqu’en face des formes décisivement ordonnées, elle se révèle en se reconnaissant. Car rien ne nous touche d’absolument étranger, rien ne possède pour nous d’éloquence s’il ne trouve en nous-même son écho véridique ; et, ainsi que pour la physique supérieure tous les phénomènes ne sont peut-être que des modalités de l’unique Énergie, l’objectif serait un mode ignoré de notre âme, tout le possible encore obscur qu’elle contient et où elle se découvre par sa trace, comme le rythme dans l’harmonie, comme le temps à travers sa mesure d’espace.

Enfin, en comparant ceci à ce qui fut écrit plus haut, j’aimerais à terminer par cette affirmation :

Le rythme nous avertit de la vie en sa marche incessante vers le but ignoré ; l’harmonie, qui en procède, est le signe de notre Prédestination.