(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 515-516
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(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 515-516

PIERRE DE St. LOUIS, Religieux de l’Ordre des Carmes, né à Valréas en Provence en 1626, mort vers l’an 1700.

L’extravagance a contribué à sa célébrité, autant qu’auroit pu le faire un talent distingué. Qui n’a pas lu ou n’a pas entendu parler de son Poëme intitulé, la Madeleine au Désert de la Sainte-Beaume, en Provence ? Ce Poëme est un chef-d’œuvre étonnant de ridicule & de mauvais goût. Le sacré & le profane, la dévotion & la galanterie, le sérieux & le comique, l’histoire & la fiction, les traits d’esprit & les platitudes, la raison & la folie, y forment un tissu bizarre qui amuse toutefois le Lecteur, même le plus difficile, par des saillies toujours variées & toujours imprévues.

Cet excès de singularité procura un débit rapide à cet Ouvrage, & détermina M. de la Monnoie à le faire réimprimer, en faveur de ceux qui n’avoient pu se procurer la premiere édition. Il est inutile de rappeler qu’il plut des Sonnets & des Epigrammes à la louange de l’Auteur. Le mauvais goût ne manque jamais de trouver des partisans & des panégyristes, lors même que le bon est éclairé par des préceptes & des exemples. Il est vrai que le Poëme de la Madeleine n’a été guere célébré que par des confreres ou des parens du Poëte ; mais aujourd’hui nos plus mauvais Auteurs ont une fraternité terriblement féconde en éloges : on seroit tenté de croire que certains Journalistes sont ou parens ou confreres de tous les plus mauvais Auteurs.