(1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »
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(1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

Chapitre IV.
Des figures : métaphores, métonymies, périphrases

Voilà donc les ressources que nous offrent les mots, soit isolément, par l’élasticité de leur sens propre et la puissance d’évocation qui leur appartient, soit assemblés, par leur simple contact et la modification particulière qui en résulte pour chacun d’eux. Il faut considérer en eux maintenant d’autres propriétés, qui achèvent de les rendre capables de servir à tous les besoins de la plus agile et plus curieuse pensée. D’abord ils sont capables d’exprimer d’autres objets que ceux auxquels ils correspondent par définition. Outre leur sens propre, ils peuvent prendre des sens figurés : c’est à ces emplois qu’on a donné le nom de tropes. Quelques figures de pensées, ou figures de passions, ne sont aussi que des corruptions momentanées et voulues du sens exact des mots11. Ensuite, par certains arrangements de mots qui ne sont pas conformes aux rigoureuses prescriptions de la grammaire, on peut ajouter au sens où la construction régulière des mêmes mots atteindrait, ou lui donner la nuance précise que la pensée exige : c’est ce qu’on appelle les figures de construction. Enfin par certaines combinaisons régulières ou du moins correctes, mais qui détournent les constructions de leur emploi ordinaire comme les tropes détournent les mots de leur sens commun, on peut rendre certains sentiments et certaines idées dont la langue ne pourrait autrement marquer l’exact degré et la couleur particulière. C’est ce qu’on appelle les figures de pensées, figures de passion, d’imagination ou de raisonnement. En général, les figures servent à rendre ce qui échappe à la prise brutale et matérielle des mots : on ne s’étonnera donc pas qu’elles servent surtout à traduire ce qui est sentiment ou passion ; les pures idées intellectuelles et les objets du monde réel sont en général directement touchés par les mots et par l’application littérale des lois communes de la grammaire et de la syntaxe.

Notre esprit, percevant soudain une qualité commune en deux objets différents, ou créant entre eux un rapport qui les assimile, nomme l’un du terme qui convient ou qui appartient à l’autre : il fait une métaphore. Je n’ai pas à insister sur l’importance de la métaphore : sans elle, il est impossible de parler ou d’écrire. Elle a été un des procédés les plus féconds qui aient contribué à former le langage humain ; et dans le développement et l’évolution de chaque langue, son rôle a été immense.

L’homme a distingué d’abord et nommé ce qui le touchait de plus près : quand le cercle de ses idées et de ses connaissances s’est élargi, il n’a point créé les mots à profusion ; il a appliqué autant qu’il a pu ceux qu’il possédait déjà aux objets nouveaux qu’il découvrait, et n’a enrichi sa langue que par la multiplication des métaphores. Le soleil et les astres se sont couchés et se sont levés, comme lui. Le temps a marché, comme un voyageur, s’est écoulé, comme un fleuve. Le monde matériel a prêté tout son vocabulaire au monde spirituel : un souffle, un vent a désigné l’âme. Elle a été dotée de toutes les épithètes, de tous les verbes qui indiquent les qualités et les actions des objets sensibles : elle a été élevée, basse, elle a eu des idées étendues, étroites, des sentiments vifs ou lents, ardents ou froids. Les passions l’ont agitée, bouleversée, déchirée ; la souffrance l’a blessée, fait saigner, écrasée, fait plier : elle s’est élancée, elle a tremblé, elle a reculé. Elle a été échauffée par l’enthousiasme, embrasée par l’amour, glacée par la terreur.

Les langues de récente formation ont hérité en grande partie de cette abondante provision de métaphores, qui est allée sans cesse s’enrichissant depuis les temps anciens, et elles y ont encore ajouté. Un bon nombre de mots de la langue française ne sont que des métaphores, quand on les rapporte à leur origine latine. La tête, c’est en latin un tesson de pot ; la gorge est un gouffre, et le talent, un poids. À chaque instant, on se trouve en présence de termes détournés de leur sens propre : ils nous économisent des mois qu’il aurait fallu forger ; nulle idée de comparaison ne s’éveille quand on les prononce ; ce ne sont plus des métaphores que pour le philologue : dans la pratique ils font l’office de mots propres. Le roitelet, la bergeronnette, le bouvreuil, ne sont pas pour nous un petit roi, une petite bergère, un petit bouvier : nous ne songeons guère à ces gentilles et poétiques images ; et ces mots valent pour nous autant que chat ou cheval, où l’étymologie ne découvre pas de figure. Pareillement nous ne croyons pas prendre dans la trappe celui que nous attrapons, ni attirer avec le leurre celui que nous leurrons ; les gens délurés, hagards, niais, ne représentent guère des faucons à notre imagination, et quand nous dessillons les yeux de quelqu’un, nous ne nous figurons point être un fauconnier qui découvre les paupières de l’animal enfin dompté. Une feuille d’or ou de papier, un cheval ferré d’argent 12, sont des expressions qui dans l’usage désignent leurs objets sans métaphore. Faute d’autres, elles se sont vidées de toute image et sont devenues simples.

Il en est aussi qui, moins nécessaires, ont cependant été si constamment et communément reçues que toute image, toute métaphore a disparu. Quand nous parlons d’exprimer une pensée, nous ne pensons point nous comparer au sculpteur qui tire une figure d’un bloc de marbre. Quand les lettres de commerce font courir le mois et l’année, quand les règlements administratifs font courir les appointements des fonctionnaires, soyez sûres que les rédacteurs ne croient pas faire une figure, et que nulle forme légère et mobile ne passe devant leurs yeux : ils ne voient pas d’autres mots pour ce qu’ils veulent dire. Le créancier qui apprend que son débiteur suspend ses payements ne voit aucune image là-dedans, et ne se représente rien que l’ennui de n’être pas payé. Le préfet qui suspend un maire, ne se le figure pas autrement qu’exclu pour un temps de la mairie. Quelle exubérante fantaisie, quelle richesse d’inventions grotesques et imprévues le langage vulgaire fournirait, si l’on voulait rappeler à leur sens propre toutes les métaphores qu’on fait sans cesse sans s’en douter et sans pouvoir faire autrement ! Il n’y aurait presque point de phrase que le crayon du dessinateur ne pût traduire : et que de fois la traduction serait une caricature !

Je n’ai point à m’arrêter ici sur ces métaphores inconscientes et effacées, qui sont l’expression pure et propre des objets. On devra seulement remarquer qu’il ne faut, quand on les emploie, ni les modifier ni les développer : il y faut du moins beaucoup de précaution et une grande légèreté de main. Sinon, en voulant y faire reparaître le sens métaphorique, on s’exposerait à parler le langage des Précieuses ridicules.

« Mais de grâce, Monsieur, ne soyez pas inexorable à ce fauteuil qui vous tend les bras il y a un quart d’heure, contentez un peu l’envie qu’il a de vous embrasser. »

La véritable métaphore présente à la fois deux objets à l’imagination, l’un qui est dans le sens propre du mot, l’autre qui par le moyen du premier s’éveille dans la pensée. Généralement elle contient en germe une comparaison, et manifeste une certaine communauté de nature ou d’état entre les deux objets qu’elle accouple.

Le sang de vos rois crie et n’est point écouté.
(Racine.)
Lorsque je vois, parmi tant d’hommes différents,
Pas une étoile fixe, et tant d’astres errants.
(Racine.)
Le soir vint : l’orgue en deuil se tut dans le saint lieu.
(V. Hugo.)
La nuit vint : tout se tut ; les flambeaux s’éteignirent :
Dans les bois assombris les ruisseaux se plaignirent.
(V. Hugo.)
Sa barbe était d’argent, comme un ruisseau d’avril.
(V. Hugo.)
Les éléphants rugueux, voyageurs lents et rudes,
Vont au pays natal à travers les déserts…..
Et creusant par derrière un sillon sablonneux,
Les pèlerins massifs suivent leur patriarche.
(Leconte de Lisle.)

Souvent la métaphore se continue en plusieurs mots, dont l’un exprime la comparaison des deux objets, et les autres ce que l’on compare en eux. Ainsi Rotrou appelle les jeunes martyrs du christianisme :

Ces fruits à peine éclos, déjà mûrs pour les cieux.

Ailleurs l’objet auquel on compare celui qu’on veut faire connaître, et d’où se tire la métaphore, n’est pas désigné : il n’est révélé que par les qualités qui lui sont propres, et qu’on attribue à l’autre. C’est ce qui arrive toutes les fois que la métaphore porte sur un verbe ou un adjectif. V. Hugo, comparant la France à un vaisseau, n’a pas nommé le vaisseau, quoiqu’il pût le faire sans violence entrer dans son vers, et il a préféré écrire, enserrant la métaphore entre deux mots propres :

Nous sommes un pays désemparé, qui flotte,
Sans boussole, sans mâts, sans ancre, sans pilote,
Sans guide, à la dérive, au gré du vent hautain,
Dans l’ondulation obscure du destin.

Le sentiment qui crée la métaphore peut, de l’idée sur laquelle elle est née, se communiquer aux idées voisines, et les transformer en images analogues. Quand V. Hugo eut vu de ses yeux de poète la terre, non échauffée par le soleil, mais se chauffant au soleil, elle lui parut naturellement frileuse plutôt que froide, et ce dernier mot précisant l’image, la poussa à s’assimiler encore les idées prochaines :

Frileuse, elle se chauffe au soleil éternel,
Rit, et fait cercle avec les planètes du ciel,
       Comme des sœurs autour de l’âtre.

Ailleurs, la vulgaire comparaison du croissant de la lune à une faucille, gagnant par une contagion semblable les autres idées réunies dans la même phrase, entourant l’image primitive d’images complémentaires, a créé un merveilleux tableau :

Tout reposait dans Ur et dans Jerimadeth ;
Les astres émaillaient le ciel profond et sombre ;
Le croissant fin et clair, parmi ces fleurs de l’ombre,
Brillait à l’occident, et Ruth se demandait,
Immobile, ouvrant l’œil à moitié sous ses voiles,
Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été
Avait, en s’en allant, négligemment jeté
Cette faucille d’or dans le champ des étoiles.

Il arrive que la métaphore, dans cette extension spontanée, teint de sa couleur tout un groupe d’idées : elle devient alors indépendante, elle se suffit à elle-même, et le sens propre des mots qui sont assemblés dans la phrase et dérivent tous de la même image, contente l’esprit, en dehors de toute réflexion sur le sens figuré. La métaphore tourne alors à l’allégorie.

Ce vieillard possédait des champs de blés et d’orge ;
Il était, quoique riche, à la justice enclin ;
Il n’avait pas de fange en l’eau de son moulin,
Il n’avait pas d’enfer dans le feu de sa forge.
(V. Hugo.)

Vouloir classer les métaphores usitées serait faire le dénombrement de tous les rapports perçus dans l’univers par l’esprit de l’homme : vouloir répartir en catégories les métaphores possibles serait aussi chimérique que de prétendre faire le tableau des découvertes futures de l’humanité. Tout tient à tout ; tout peut se comparer à tout, il suffit d’un moment pour qu’un rapport inaperçu soit perçu et qu’il existe au moins dans l’esprit qui le perçoit.

Cependant on a distingué certaines espèces de métaphores13, dont il est assez aisé de donner la formule : ce sont celles où l’idée que l’on a dans l’esprit, et celle dont on applique l’expression à la première, sont entre elles dans un rapport simple, nettement défini, permanent même, et dépendant le moins possible de la fantaisie de l’écrivain, connu de tous ou facilement perceptible à tous. Ainsi l’on nomme la cause pour reflet ; l’effet pour la cause ; l’instrument pour l’acte ou l’acteur ; l’œuvre pour l’auteur ; les dieux pour les actions, les objets, les éléments auxquels ils président ; le contenant pour le contenu ; la résidence pour l’habitant ; le lieu d’origine pour le produit ; le signe pour la chose signifiée ; le possesseur pour la chose possédée ; les parties du corps pour les facultés ou les qualités dont on convient qu’elles sont le siège ; l’espèce pour le genre ; le genre ou l’individu pour l’espèce ; la matière pour l’objet qui en est fait ; la partie pour le tout ; le fleuve pour le pays qu’il arrose ou pour le peuple qui vit sur ses bords. De ces figures les unes contiennent une comparaison :

Devant ce grand Dandin l’innocence est hardie :
Oui, devant ce Caton de basse Normandie,
Ce soleil d’équité qui n’a jamais terni.
(Racine.)
Ne les raillez pas, camarade :
Saluez plutôt chapeau bas
Ces Achilles d’une Iliade
Qu’Homère n’inventerait pas.
(Th. Gautier.)

Mais le plus grand nombre ne renferme point de comparaison. Elles substituent au nom propre de l’objet le mot qui fait ressortir un attribut, une propriété, un caractère, sur lequel le mot propre n’appellerait pas suffisamment l’attention : ainsi lorsqu’Alfred de Musset représente les paysans de la Forêt-Noire qui viennent perdre leur argent à la roulette de Bade, il ne nomme pas l’argent, mais la sueur qu’il leur a coûtée, le pain qu’il leur donnerait :

Je les ai vus, debout, sous la lampe enfumée,
Avec leur veste rouge et leurs souliers boueux,
Tournant leurs grands chapeaux entre leurs doigts calleux,
Poser sous les râteaux la sueur d’une année,
Et là, muets d’horreur devant la destinée,
Suivre des yeux leur pain qui courait devant eux.

On ne s’inquiète plus guère aujourd’hui de la noblesse de la figure, et on ne lui demande que la justesse et la convenance. Au reste le vieux Malherbe ni Corneille ne faisaient pas tant de façon, ni Pascal, ni Bossuet ; et ils ont plus d’une fois scandalisé la délicatesse grimacière de La Harpe et de ses pareils. La liberté de prendre ses métaphores dans la réalité familière, triviale même, a été reconquise avec le droit d’employer le mot propre, et nul ne s’étonne plus, quand V. Hugo, montrant l’armée de Sennachérib miraculeusement anéantie, écrit :

Mais le ciel eut pitié de vingt peuples tremblants,
Dieu souffla sur cet astre aux crins étincelants,
Et soudain s’éteignit l’effrayante merveille,
Comme une lampe aux mains d’une veuve qui veille.

La préoccupation de la noblesse des métaphores mène souvent à la banalité. Il faut s’en garder soigneusement, repousser la tentation facile des images que dix générations se sont léguées pour décorer le discours. Le poison de la flatterie, le flambeau de la sédition, le torrent de la démocratie, la hache du despotisme, le bandeau de la superstition, les ténèbres de l’ignorance, le glaive de la loi, la balance de la justice, l’hermine du magistrat, l’aigle de Meaux, le cygne de Cambrai, la perfide Albion et la moderne Babylone, l’Athènes de la Champagne ou l’Athènes du Midi, l’esclavage ou la tyrannie des passions, les foudres de l’éloquence ou de la vengeance divine, et les lions, les lauriers, les astres, les trésors métaphoriques qui depuis trois cents ans ont régné, débordé, fleuri dans la littérature ; etc., etc. : autant de vieilleries, dont on ne saurait trop sévèrement s’interdire l’usage. Ce n’est pas à dire qu’on ne puisse renouveler ces mêmes images ; si ce n’était trop long, il me serait aisé de les signaler presque toutes dans les plus beaux vers de nos poètes contemporains. Mais il ne faut pas les prendre comme usitées et traditionnelles ; il ne faut pas y être conduit par l’opération mécanique de la mémoire : il faut qu’elles jaillissent, créées à nouveau pour un besoin nouveau, du sentiment intime et de l’imagination personnelle. Alors elles seront fraîches, sincères, originales, bien que vieilles comme le monde.

On ne saurait aussi se mettre trop en garde contre les métaphores qui n’ont pour effet que de provoquer le lecteur à la recherche du terme propre qu’elles cachent. Si la figure n’est qu’un rébus, si ce n’est qu’un mot à deviner, elle est mauvaise, et il faut la supprimer. Un bon nombre de métaphores qui appartiennent aux catégories que j’ai énumérées en dernier lieu et qu’on appelle proprement métonymies et synecdoches, seront dans ce cas. Aussi, à moins qu’elles n’aient acquis par l’usage la force des termes propres, et que se suffisant comme eux à elles-mêmes elles n’aient plus besoin d’être traduites, elles nuisent plus qu’elles ne servent ; elles détournent l’esprit sur une étude purement verbale, et affaiblissent par-là l’effet de la pensée qu’elles sont chargées d’exprimer. C’est pourquoi nos écrivains ne se soucient plus guère de les employer, et l’on a renoncé à dire Cérès pour du pain, Neptune pour la mer, et Bellone, pour la guerre. On aime mieux dire la tragédie que Melpomène, et la justice que Thémis, un homme qu’un mortel, l’épée que le fer, la cloche que l’airain. Mieux vaut appeler la chose par son nom, qui évoquera mieux les idées et les images qui s’y sont associées : à cet égard, le mot mer est plus expressif, traîne un plus riche cortège d’impressions, que le mot Thétis. Pour que la figure soit bonne, il faut qu’éveillant instantanément l’idée de l’objet sans que l’esprit sente le besoin de repasser par le mot propre qui le désigne, elle le présente accompagné et comme enrichi de tout ce que peuvent suggérer et l’objet signifié et l’expression figurée.

Delille traduit ainsi un vers de Virgile ;

Et Mars forge ses dards des armes de Cérès.

Ces métaphores ne nous proposent rien que la recherche des deux mots : guerre et agriculture : là s’arrête leur énergie. Virgile avait dit : « Des faux recourbées on forge de dures épées » ; et les mots propres, par leur force d’attraction, nous mettaient sous les yeux le paysan qui fauche et le soldat qui tue. Le mot propre surpasse donc ici la métaphore. Mais quand V. Hugo écrit :

Vos régiments, pareils à l’hydre qui serpente,
Vos Austerlitz tonnants, vos Lutzen, vos Lépante,
          Vos Iena sonnant du clairon,
Vos camps pleins de tambours que la mort pâle éveille
Passent pendant qu’il (Dieu) songe, et font à son oreille
          Le même bruit qu’un moucheron ;

l’esprit, n’ayant besoin d’aucun effort pour ramener l’idée du mot propre, les batailles et les victoires, n’ayant même pas à repasser par ce mot propre, s’abandonne tout entier à l’impression de la figure, et l’imagination voit défiler toutes les scènes terribles ou glorieuses que ces grands noms font surgir de la mémoire.

Je n’ai pas besoin de dire que les métaphores doivent être claires : cela va de soi. On condamne les métaphores forcées, et l’on a raison, mais il est bon de dire qu’une métaphore forcée est une métaphore qui n’est pas suffisamment claire. Tout peut se comparer à tout : mais il faut bien saisir et bien montrer le rapport. Que de métaphores hardies passeraient pour forcées, si l’auteur ne les avait pas éclairées précisément comme il fallait. Montrer des canons accroupis à la porte des Invalides peut paraître bizarre : la figure cependant est d’une justesse saisissante dans le vers de V. Hugo :

Les canons monstrueux à la porte accroupis.

C’est que l’adjectif monstrueux a jeté un rayon de lumière sur le participe accroupis, et l’on saisit immédiatement la comparaison de ces canons aux monstres que les Égyptiens et les Assyriens plaçaient aux portes de leurs palais.

On s’est souvent préoccupé chez nous de l’incohérence, de la préparation et de la suite des métaphores : et la question ne laisse pas d’être embarrassante.

On blâme l’incohérence des métaphores : tout le monde connaît la fameuse phrase : « Le char de l’État navigue sur un volcan. » Corneille a été censuré par l’Académie pour avoir écrit :

Malgré des feux si beaux qui rompent ma colère.

Et ces vers de J.-B. Rousseau ont été tournés en ridicule :

Et les jeunes zéphirs, de leurs chaudes haleines,
          Ont fondu l’écorce des eaux.

Cependant l’incohérence des images ne déplaît ni dans Eschyle ou Aristophane, ni dans Shakespeare ou Shelley. Et chez nous c’est chicane de grammairien que de ne pas goûter ce fier début d’une ode de Malherbe :

Donc un nouveau labeur à tes armes s’apprête ;
Prends ta foudre, Louis, et va comme un lion
Donner le dernier coup à la dernière tête
                    De la rébellion.

De même, dans ces strophes de V. Hugo, les métaphores se greffent l’une sur l’autre :

L’Angleterre prit l’aigle, et l’Autriche l’aiglon.
Vous savez ce qu’on fit du géant historique.
Pendant six ans on vit, loin derrière l’Afrique…..
Cette grande figure en sa cage accroupie,
         Ployée, et les genoux aux dents.

Encor si ce banni n’eût rien aimé sur terre !…
Mais les cœurs de lion sont les vrais cœurs de père.
         Il aimait son fils, ce vainqueur.
Deux choses lui restaient dans sa cage inféconde,
Le portrait d’un enfant et la carte du monde,
         Tout son génie et tout son cœur.

On veut que les métaphores soient préparées. Ainsi, dans ce couplet de Corneille, tout aboutit à l’image hardie du dernier vers et en fait le couronnement logique et nécessaire de la pensée.

Se pare qui voudra du nom de ses aïeux ;
Moi, je ne veux porter que moi-même en tous lieux.
Je ne veux rien devoir à ceux qui m’ont fait naître,
Et suis assez connu sans les faire connaître.
Mais pour en quelque sorte obéir à vos lois,
Seigneur, pour mes parents je nomme mes exploits ;
Ma valeur est ma race, et mon bras est mon père.

D’autre part, il arrive souvent que rien n’annonce la métaphore : elle se présente toute seule, et si elle est claire et juste, elle n’a pas besoin d’introducteur ; on ne lui demande pas de passeport. Même parfois elle est d’autant plus expressive qu’elle est plus inattendue, et la brusquerie en double l’énergie. Voici une période de V. Hugo où, faisant succéder les images et les groupes d’images sans les préparer, il nous ménage pour finir une surprise saisissante : il peint l’enfance du roi de Rome, fils de Napoléon :

Ô revers, ô leçon ! Quand l’enfant de cet homme
Eut reçu pour hochet la couronne de Rome ;
Lorsqu’on l’eut revêtu d’un nom qui retentit ;
Lorsqu’on eut bien montré son front royal qui tremble
Au peuple émerveillé qu’on puisse tout ensemble
          Être si grand et si petit ;

Quand son père eut pour lui gagné bien des batailles,
Lorsqu’il eut épaissi de vivantes murailles
Autour du nouveau-né riant sur son chevet ;
Quand ce grand ouvrier, qui savait comme on fonde,
Eut, à coups de cognée, à peu près fait le monde
          Selon le songe qu’il rêvait ;

Quand tout fut préparé par les mains paternelles
Pour doter l’humble enfant des splendeurs éternelles ;
Lorsqu’on eut de sa vie assuré les relais ;
Quand, pour loger un jour ce maître héréditaire,
On eût enraciné bien avant dans la terre
          Les pieds de marbre des palais ;

Lorsqu’on eut pour sa soif posé devant la France
Un vase tout rempli du vin de l’espérance ;
Avant qu’il eût goûté de ce poison doré,
Avant que de sa lèvre il eût touché la coupe,
Un cosaque survint qui prit l’enfant en croupe,
          Et l’emporta tout effaré.

On loue les métaphores bien soutenues comme dans ces vers de Boileau :

À peine du limon où le vice m’engage
J’arrache un pied timide, et sors en m’agitant,
Que l’autre m’y reporte et s’embourbe à l’instant.

Mais écoutons un peu les Précieuses :

Mascarille. — Le mérite a pour moi des charmes si puissants que je cours partout après lui.

Madelon. — Si vous poursuivez le mérite, ce n’est pas sur nos terres que vous devez chasser.

Cathos. — Mais, de grâce, Monsieur, ne soyez pas inexorable à ce fauteuil qui vous tend les bras il y a un quart d’heure ; contentez un peu l’envie qu’il a de vous embrasser.

Jodelet. — Je me trouve un peu incommodé de la veine poétique, pour la quantité des saignées que j’y ai faites ces jours passés.

Et les Femmes savantes avec leur poète :

PHILAMINTE

Servez-nous promptement votre aimable repas.

TRISSOTIN

Pour cette grande faim qu’à mes yeux on expose,
Un plat seul de huit vers me semble peu de chose.
Et je pense qu’ici je ne ferais pas mal
De joindre à l’épigramme ou bien au madrigal
Le ragoût d’un sonnet, qui chez une princesse
A passé pour avoir quelque délicatesse.
Il est de sel attique assaisonné partout,
Et vous le trouverez, je crois, d’assez bon goût.

Qu’y a-t-il de ridicule dans ce langage ? C’est précisément l’exacte précision avec laquelle chaque métaphore est suivie et développée.

Comment ménager le passage des expressions métaphoriques aux termes propres ? Peuvent-ils se mêler dans la même phrase ? Tout réduire à la métaphore, c’est le procédé des précieux : mais jeter la métaphore au milieu des termes propres, n’est-ce pas scabreux aussi, et souvent ridicule ? J’ai lu quelque part cette phrase : « Le sabre qui gouvernait (Napoléon Ier) ne s’inquiétait guère de Calderón ni de Schiller. »

Et cependant nul ne s’étonne ni n’est choqué des vers suivants :

Rome buvait, gaie, ivre, et la face rougie…..
Rome horrible chantait. Parfois, devant ses portes,
Quelque Crassus, vainqueur d’esclaves et de rois,
Plantait le grand chemin de vaincus mis en croix…..
(V. Hugo.)
Je ne suis qu’un limon par les vices noirci…..
(V. Hugo.)
Ainsi le grand vieillard en images hardies
Déployait le tissu des saintes mélodies.
(A. Chénier.)

Pourquoi cite-t-on ce vers comme burlesque :

Le vrai feu d’artifice est d’être magnanime ?

et pourquoi admet-on celui-ci :

L’herbe que je voulais arracher de ce lieu,
C’est ton oisiveté ?
(A. de Musset.)

Cette confusion des métaphores et des termes propres n’est pas propre aux écrivains de notre siècle. On la rencontre dans Bossuet, paraphrasant Ézéchiel. « Assur, dit ce saint prophète, s’est élevé comme un grand arbre, comme le cèdre de Liban : le ciel l’a nourri de sa rosée, la terre l’a engraissé de sa substance ; les puissances l’ont comblé de leurs bienfaits, et il suçait de son côté le sang du peuple. C’est pourquoi il s’est élevé, superbe en sa hauteur, beau en sa verdure, étendu en ses branches, fertile en ses rejetons ; les oiseaux faisaient leurs nids sur ses branches ; les familles de ses domestiques, les peuples se mettaient à couvert sous son ombre. »

Ailleurs Bossuet compare l’homme à un édifice ruiné, et ajoute : « Il est tombé en ruine par sa volonté dépravée », ce qui ne peut se dire d’un édifice et déplaît à Condillac.

Voilà bien des contradictions. Où est la vérité ? où est la règle ? La règle de Condillac, « ne rien ajouter qui ne soit dans l’analogie du premier trope », ne subsiste pas, après les exemples que j’ai donnés ; et d’autre part, toutes les discordances ne sont point acceptables ; il y a une certaine harmonie dont il faut observer la secrète finesse. Si l’on regarde les exemples contradictoires que j’ai rassemblés, on verra peut-être surgir quelques indications. Voici ce que l’on en pourra conclure. Les métaphores n’ont pas besoin d’être préparées, ni annoncées par l’écrivain, mais comprises par le public ; et elles sont suffisamment amenées, dès qu’on les rend claires et justes. L’incohérence des métaphores n’est guère choquante que quand les mots qui les expriment sont étroitement subordonnés entre eux par des rapports de dépendance grammaticale, et cesse de provoquer les objections, dès qu’elles sont contenues dans des expressions juxtaposées et des propositions parallèles ; alors l’esprit voit sans chagrin défiler devant lui les images les plus différentes, dont chacune brille un moment, s’éclipse et fait place aux autres, et il n’y a à craindre de sa part que la fatigue et l’éblouissement de tant d’éclairs successifs, non la révolte du goût offensé. La métaphore soutenue plaît ou déplaît, selon que dans cette continuité l’on sent une rencontre naturelle ou une recherche laborieuse ; elle est de bon goût, quand les expressions figurées qui font cortège à la figure initiale naissent d’une création incessante de l’imagination, qui garde l’image comme elle la changerait, par la découverte instantanée et toujours renaissante de ressemblances successives ; elle est de mauvais goût, quand, par un renversement des rôles, l’esprit sacrifie la pensée à la figure, quand celle-ci, devenant tyrannique en cessant d’être dépendante, avide de durer, ne laisse plus pénétrer dans la phrase que les idées qu’elle peut absorber et amalgamer. Il y a une grande différence entre un groupe d’images homogènes exprimant des idées connexes, et la dislocation d’une image unique dont on présente successivement tous les membres. Pour le mélange des termes propres et des expressions métaphoriques, il est indispensable pour maintenir la rigueur du sens, la précision de la pensée et la justesse de la figure, et il faut seulement éviter d’établir entre des mots qui jurent une dépendance grammaticale qui surchargerait la figure d’une autre figure14. Enfin il ne faut jamais oublier que la métaphore a pour objet d’indiquer à l’esprit une comparaison possible, et non d’instituer une comparaison formelle : le point de contact du mot propre et du terme figuré doit être indiqué avec une précision rigoureuse, mais rien de plus. Le charme s’évanouit, si le développement de la métaphore emprisonne l’imagination : il ne faut pas tracer des sentiers, ni planter des jalons et des piquets dans le champ où on l’introduit. C’est une porte qu’on lui ouvre sur des espaces illimités dont elle visitera ce qu’elle voudra, selon son humeur paresseuse ou vagabonde. Étudiez l’incomparable style de Bossuet ; prenez le Sermon sur la mort, et tous ces conseils s’éclairciront ; vous y verrez la métaphore brusque ou préparée, suivie ou abandonnée, plongée au milieu des termes propres ou de métaphores dissemblables, lâchée dès qu’elle ne serait plus qu’une curiosité ou un obstacle, avec une souplesse et une fortune merveilleuses, sans autre règle apparente que l’universelle et l’infaillible règle de donner à la pensée l’expression adéquate, transparente, qui n’y ajoute rien et n’en retranche rien :

Multipliez vos jours, comme les cerfs que la fable ou l’histoire de la nature fait vivre durant tant de siècles ; durez autant que ces grands chênes sous lesquels nos ancêtres se sont reposés et qui donneront encore de l’ombre à notre postérité ; entassez, dans cet espace qui paraît immense, honneurs, richesse, plaisir : que vous profitera cet amas, puisque le dernier souffle de la mort, tout faible, tout languissant, abattra tout à coup cette vaine pompe, avec la même facilité qu’un château de cartes, vain amusement des enfants ? Que vous servira d’avoir tant écrit dans ce livre, d’en avoir rempli toutes les pages de beaux caractères, puisque, enfin, une seule rature doit tout effacer : encore une rature laisserait-elle quelque trace, du moins d’elle-même ; au lieu que ce dernier moment, qui effacera d’un seul trait tout notre vie, s’ira perdre lui-même avec tout le reste dans ce grand gouffre du néant…

Qu’est-ce donc que ma substance, ô grand Dieu ? J’entre dans la vie pour en sortir bientôt ; je viens me montrer comme les autres ; après, il faudra disparaître. Tout nous appelle à la mort ; la nature, comme si elle était presque envieuse du bien qu’elle nous a fait, nous déclare souvent et nous fait signifier qu’elle ne peut pas nous laisser longtemps ce peu de matière qu’elle nous prête, qui ne doit pas demeurer dans les mêmes mains, et qui doit être éternellement dans le commerce ; elle en a besoin pour d’autres formes, elle la redemande pour d’autres ouvrages.

Cette recrue continuelle du genre humain, je veux dire les enfants qui naissent, à mesure qu’ils croissent et qu’ils s’avancent, semblent nous pousser de l’épaule et nous dire : Retirez-vous, c’est maintenant notre tour. Ainsi comme nous en voyons passer d’autres devant nous, d’autres nous verront passer, qui doivent à leurs successeurs le même spectacle. Ô Dieu ! encore une fois qu’est-ce que nous ? Si je jette la vue devant moi, quel espace infini où je ne suis pas ! si je la retourne en arrière, quelle suite effroyable où je ne suis plus ! et que j’occupe peu de place, dans cet abîme immense du temps ! Je ne suis rien ; un si petit intervalle n’est pas capable de me distinguer du néant ; on ne m’a envoyé que pour faire nombre, encore n’avait-on que faire de moi, et la pièce n’en aurait pas moins été jouée, quand je serais demeuré derrière le théâtre.

Au lieu de remplacer le mot propre par un autre mot qu’on détourne de son sens habituel, on peut lui donner pour équivalent un groupe de mots dont l’ensemble éveille l’idée que le mot propre exprime. On peut se servir d’une périphrase. Le pas est facile à franchir de la métaphore à la périphrase : souvent, pour être comprise et trouver son application, la métaphore a besoin de s’allonger en périphrase. On le voit par ces vieilles et ridicules locutions : l’aigle de Meaux, le Térence français. Aussi tout ce qu’on a dit de la métaphore s’applique à la périphrase : elle contient aussi tantôt une comparaison plus ou moins marquée, tantôt une définition plus ou moins complète ou une classification plus ou moins superficielle. Ce Caton de basse Normandie, est une comparaison ; l’animal qui s’engraisse de glands, est une définition ; ce grand empereur, est une classification.

La périphrase qui n’a d’autre but que d’éviter le mot propre, ou d’amuser à sa recherche la curiosité du lecteur, la périphrase qui n’est qu’un masque ou une charade, ne saurait être trop rigoureusement condamnée. C’est celle de Delille et de ses contemporains. Alors on ne disait pas : « Mon père labourait son champ ; un soldat est venu lui saisir ses bœufs », on disait noblement :

                   Mon père, au pied des monts
Qui bordent Unterwald et que nous habitons,
Ouvrait avec le soc son antique héritage ;
Un soldat se présente avide de pillage,
Et d’un bras forcené saisit les animaux
Qui servaient à pas lents ses rustiques travaux.
(Lemierre, Guillaume Tell.)

J’ai regret qu’André Chénier ait dit dans ses admirables Iambes :

Peut-être avant que l’heure en cercle promenée
          Ait posé sur l’émail brillant,
Dans les soixante pas où sa course est bornée,
          Son pied sonore et vigilant,
Le sommeil du tombeau pressera ma paupière.

Mais on est toujours de son siècle par quelque endroit. Le romantisme, en brisant la hiérarchie des mots qui faisait les uns éternellement nobles et les autres à tout jamais bas, a mis fin à ces périphrases ingénieuses et froides, qui faisaient dévier la poésie de sa véritable voie et l’amusaient à des jeux d’enfants :

Je nommai le cochon par son nom : pourquoi pas ?…
J’ai de la périphrase écrasé les spirales…
J’ai dit au long fruit d’or : Mais tu n’es qu’une poire,
(V. Hugo.)

Toutes les périphrases ne sont pas des rébus, qui ne donnent qu’un mot à découvrir. Il y en a qui sont bonnes, fécondes, nécessaires, et la même change de valeur selon l’occasion. « Il y a des lieux, dit Pascal, où il faut appeler Paris Paris, et d’autres où il le faut appeler capitale du royaume. » La condition essentielle sans laquelle la périphrase n’est pas recevable, c’est qu’elle désigne si vivement l’objet qu’on ne s’aperçoive même pas de l’absence du mot propre. Mais cela ne suffit pas : si elle ne contenait rien de plus, elle serait inutile, et dans tous les arts, ce qui ne sert pas nuit ; ce qui n’est pas bon est mauvais. Il faut donc que la périphrase à cette parfaite transparence ajoute quelques avantages positifs, qu’elle présente des idées et des images intéressantes, convenables, et dont le retranchement mutilerait la pensée de l’écrivain. Voltaire écrit quelque part :

Bellone va réduire en cendres
Les courtines de Philipsbourg
Par cinquante mille Alexandres
Payés à quatre sous par jour.

S’il eût dit sans périphrase, cinquante mille soldats, qui ne sent ce que la pensée eût perdu ? Précisément toute sa poésie, ce qui fait rêver, cette pointe de philosophie railleuse et désabusée, qui ouvre un jour soudain sur les grandeurs et les petitesses de la vie militaire. Et quand Gilbert attaque la coterie encyclopédique :

Eux seuls peuvent prétendre au rare privilège
D’aller au Louvre, en corps, commenter l’alphabet,
Grammairiens jurés, immortels par brevet :

s’il eût dit simplement le privilège d’entrer à l’Académie, la moitié de sa pensée fût restée au bout de sa plume.

Quand Racine fait dire à Joad :

Celui qui met un frein à la fureur des flots,
Sait aussi des méchants arrêter les complots,

la périphrase contient la preuve de l’idée exprimée ensuite. Et de même dans la fameuse période par où Bossuet commence l’oraison funèbre de la reine d’Angleterre, la périphrase par laquelle il désigne Dieu rend tout croyable de sa puissance, et dispose à voir sa main dans les malheurs des rois. Voilà la périphrase excellente, parfaite, qui, étant partie intégrante de la pensée, n’a que l’apparence de l’ornement, et n’est pas moins nécessaire en paraissant plus libre.