(1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre IV. Unité et mouvement »
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(1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre IV. Unité et mouvement »

Chapitre IV.
Unité et mouvement

Les deux lois essentielles sont celles de l’unité et du mouvement ; de celles-là dérivent toutes les autres.

Une œuvre a de l’unité, si les parties qui la composent sont en nombre assez restreint pour que l’esprit les embrasse toutes ensemble d’une seule vue, si ces parties ont entre elles assez d’affinité pour qu’il en saisisse aisément la liaison, si enfin les impressions qu’elles font sur lui ne sont pas diverses au point de se contrarier et de s’annuler. Notre intelligence est bornée en son étendue : elle ne voit pas au-delà d’un certain rayon ; ce qui est trop grand lui échappe. Elle est bornée en sa finesse : ce qui est trop complexe la confond. Elle est bornée en sa vivacité : dans la chaîne infinie des choses, elle conçoit bien la dépendance qui unit des anneaux médiocrement éloignés, mais pour ceux qu’une longue distance sépare, il faut qu’on lui montre les chaînons intermédiaires ; elle ne peut franchir d’un coup qu’un bien petit nombre de degrés dans l’échelle des idées et des sentiments. Enfin elle est accompagnée d’une sensibilité bornée : les sensations extrêmes sont douloureuses et confuses ; les sensations analogues se mêlent et se brouillent ; les sensations contraires se détruisent ; les sensations simplement différentes s’affaiblissent et vivent aux dépens les unes des autres ; les sensations fortes sont tyranniques et veulent être seules dans l’âme, chassant ou excluant toutes les autres. De cette constitution immuable de notre nature sort la nécessité qui s’impose à l’artiste et à l’écrivain de découper dans le monde immense et divers des formes et des pensées un fragment de médiocre dimension, formant un tout homogène, capable d’être supposé indépendant et isolé du reste, présentant un rapport des parties facilement intelligible à l’esprit, et fournissant une diversité d’impressions facilement réductibles en une émotion dominante.

Cette unité que l’on demande n’est point la monotonie et l’uniformité, et n’impose point la sécheresse, la raideur et la pauvreté. Elle n’est point matérielle, mais idéale : elle ne consiste pas dans la répétition indéfinie d’une seule note, dans l’extension indéfinie d’une seule couleur, dans le développement indéfini d’une seule passion ; elle est dans le rapport, dans l’harmonie que l’auteur établit et que le public saisit entre les notes, les couleurs, les passions différentes. L’unité n’est pas identité, mais accord. Elle suppose, au contraire, diversité et complexité. Elle a pour image l’être organisé, qui dans l’unité de son individu assemble des parties dissemblables, accomplissant des fonctions dissemblables, mais qui, soumises les unes aux autres, concourent toutes également à l’entretien de sa vie et à la poursuite de la fin marquée par la nature à son activité.

Au reste, il y aura, selon l’écrivain, selon le sujet, selon le lecteur, mille degrés depuis la simplicité rigoureuse jusqu’à la plus souple complexité. Le lien des parties sera plus serré ou plus lâche, l’homogénéité plus ou moins forte ; la diversité des impressions faites sur l’âme pourra aller jusqu’à une certaine contrariété, comme leur analogie pourra être resserrée dans une rigoureuse identité. C’est au goût individuel à fixer les nuances et choisir les mesures. Mais nulle part ne devra manquer l’unité suprême.

Il n’est point de chef-d’œuvre dans aucune littérature où elle fasse défaut. L’expérience de tous les pays, de tous les siècles vérifie avec éclat la loi : il apparaît, et que toujours les ouvrages transmis à l’immortalité ont leur unité, et que cette unité est obtenue par mille moyens et susceptible de mille formes.

Regardons seulement quelques-unes de ces œuvres fameuses, où l’on a cru qu’elle manquait : nous l’y trouverons, et là précisément où il fallait qu’elle fût.

La tragédie d’Horace présente trois actions : l’une, nationale et sublime, la victoire d’Horace sur les Curiaces, de Rome sur Albe : l’autre, domestique et brutale, le meurtre de Camille par son frère ; la troisième, judiciaire et froide, le procès du meurtrier. Corneille avait bien vu le péril d’un sujet, si dramatique dans le récit de l’historien, mais si rebelle, en effet, à la forme dramatique. Qu’a-t-il fait ? Il a conçu de telle façon les caractères du frère et de la sœur, il a si fortement éclairé l’opposition de leurs égoïsmes fanatiques, que la victoire d’Horace doive produire la douleur frénétique de Camille, et celle-ci exaspérer la rage patriotique de son frère jusqu’à l’assassinat : ce dernier effet de la passion d’Horace pour Rome nécessite à son tour le jugement, que le précédent effet, qui est la victoire sur Albe, fait forcément aboutir à un acquittement. Tout se tient ainsi d’une dépendance nécessaire et visible, et une seule cause se manifeste dans la diversité des effets successifs.

Dans Cinna, on ne laisse pas d’être étonné de trouver un premier acte tout républicain, tandis que la foi monarchique anime les quatre autres. Il y a pis que duplicité d’action, il y a déplacement d’intérêt. Le personnage sympathique perd notre sympathie, et le personnage odieux la gagne. L’unité de l’œuvre est ailleurs : elle est dans le caractère d’Auguste. Le poète a conçu et a voulu exprimer que, dans une âme mauvaise, un effort énergique de volonté, appuyé sur certains sentiments, la lassitude, la désillusion, le dégoût, pouvait engendrer la générosité. Pour le faire entendre, il fallait montrer le tyran haïssable avant de faire voir l’empereur magnanime : l’auteur des proscriptions devait paraître d’abord, pour se transformer jusqu’à pardonner à son assassin.

Dans Polyeucte, dans Pompée, dans Nicomède, on trouvera des personnages et des scènes où la familiarité touche au comique. Chez Molière, dans le Tartufe, dans Don Juan, dans le Misanthrope, le ton s’élèvera parfois, et la comédie semblera verser dans le tragique. Mais jamais ces émotions dissonantes ne seront dominantes et poussées jusqu’à faire obstacle à l’émotion supérieure, qui est propre au genre.

Cependant ce sont là des exemples pris de la littérature classique, et l’on ne trouvera point extraordinaire que, jusque dans leurs écarts apparents, les poètes du xviie  siècle aient, au fond, respecté les règles universellement admises en France de leur temps.

On a coutume de leur opposer le génie libre et sans entraves de Shakespeare : mais Shakespeare, s’il ne subissait pas une tradition despotique, subissait les conditions que son génie et son bon sens lui disaient être nécessaires à l’œuvre d’art pour produire son effet : d’instinct, sans dogmatiser et sans disserter, il s’y conformait, il y en enfermait sa verve et son inspiration. Aussi n’a-t-il pas manqué d’imposer à ses œuvres une réelle unité, en dépit de leur aspect capricieux et désordonné.

Je pourrais faire voir cette unité dans Othello ou dans Macbeth : j’aime mieux la rendre sensible dans une des pièces où l’on s’attendrait le moins à la trouver, dans un de ces drames que sa fantaisie découpait dans les vieilles chroniques, et où il ne semblait guère songer à mettre un autre ordre que l’ordre historique des événements : dans Richard III. À la troisième scène, la reine Marguerite, veuve de Henri VI, est amenée devant la reine Élisabeth, femme d’Édouard IV, qu’entourent ses parents et ses courtisans : et là, pour tous les malheurs de Lancastre, pour son mari, pour son fils égorgés, elle prononce une terrible malédiction contre York et tous ses partisans :

« Qu’à défaut de la guerre, votre roi périsse par la débauche, comme le nôtre a péri par le meurtre pour le faire roi ! Qu’Édouard, ton fils, aujourd’hui prince de Galles, pour Édouard, mon fils, naguère prince de Galles, meure dans sa jeunesse par une aussi brusque violence ! Toi-même, qui es reine, puisses-tu, pour moi, qui fus reine, survivre à ta gloire, ainsi que moi, misérable ! Puisses-tu vivre longtemps, à pleurer la perte de tes enfants, et, à ton tour, en voir une autre parée de tes droits, comme tu t’es installée dans les miens ! Que tes jours de bonheur meurent longtemps avant ta mort ! Et puisses-tu, après de longues heures de désespoir, mourir, n’étant plus mère, ni épouse, ni reine d’Angleterre ! — Rivers, et toi, Dorset, vous étiez là, et tu y étais aussi, lord Hastings, quand mon fils fut frappé de leurs poignards sanglants. Je prie Dieu que nul de vous ne vive son âge naturel, et que vous soyez tous fauchés par quelque accident imprévu  … »

(À Glocester, plus tard Richard III). « Si le ciel tient en réserve des châtiments plus terribles que tous ceux que je puis te souhaiter, oh ! qu’il les garde jusqu’à ce que tes crimes soient mûrs, et qu’alors il précipite son indignation sur toi, le perturbateur de la paix du pauvre monde … »

Voilà le lien de la pièce et comme l’âme : cette malédiction, qui porte avec elle une puissance fatale, ira s’accomplissant à travers le drame, jusqu’à ce que, toutes les victimes marquées par elle étant épuisées, leurs spectres se présentent au seul qui reste, à leur assassin, Richard III, et l’avertissent que son heure est venue. Encadrées entre la malédiction de Marguerite et la vision du roi, toutes ces scènes, où se distribuent les événements de tout un règne, vivent d’une même vie et s’éclairent d’un même jour, sinistre et effrayant.

En France, depuis la révolution romantique, on se pique de marcher sur les règles anciennes et de porter à tout propos des défis à Boileau. Il y a peu de gens qui aient le courage d’avouer que, bien comprises, ces règles valent encore aujourd’hui, et que les plus indépendants, s’ils ont un vrai sentiment de l’art, suivent d’instinct les lois qu’ils méprisent par théorie. C’est pourtant ce qui arrive : V. Hugo démolit bruyamment les trois unités, mais il avoue qu’après tout un sujet concentré vaut mieux qu’un sujet dispersé, sauvant ainsi ce qu’il y avait d’essentiel dans les unités, l’unité d’action et d’intérêt.

Dans un roman assez récent, l’unité se manifeste par un effet singulier et saisissant. L’auteur nous fait accompagner des marins bretons dans leurs lointaines expéditions : l’un pêche la morue en Islande, l’autre sert l’État en Indochine, tandis que les mères et les fiancées comptent tristement les jours, travaillant et écoutant les bruits de la mer. Ces scènes se passent sur trois points bien distants du globe. Mais l’écrivain, qui est poète et philosophe, y sent un rapport profond : le même soleil éclaire la froide Irlande, l’humide Bretagne, l’Inde ardente ; sur toutes les joies et toutes les douleurs de ces êtres, qui s’aiment, se regrettent, s’espèrent, il brille indifférent et verse également sa tranquille lumière.

Le matelot Sylvestre meurt sur un navire-hôpital, dans l’océan Indien.

« Pour lui faire plaisir, on finit par ouvrir un sabord, bien que ce fût encore dangereux, la mer n’étant pas assez calmée. C’était le soir, vers six heures. Quand cet auvent de fer fut soulevé, il entra de la lumière seulement, de l’éblouissante lumière rouge. Le soleil couchant apparaissait à l’horizon avec une extrême splendeur, dans la déchirure d’un ciel sombre ; sa lueur aveuglante se promenait au roulis, et il éclairait cet hôpital en vacillant, comme une torche que l’on balance……

« Il se débattait maintenant, il râlait. On épongeait aux coins de sa bouche de l’eau et du sang, qui étaient remontés de sa poitrine, à flots, pendant ses contorsions d’agonie. Et le soleil magnifique l’éclairait toujours……

« … À ce moment ce soleil se voyait aussi là-bas, en Bretagne, où midi allait sonner. Il était bien le même soleil, et au même instant précis de sa durée sans fin ; là pourtant il avait une couleur très différente ; se tenant plus haut dans un ciel bleuâtre, il éclairait d’une douce lumière blanche la grand’mère Yvonne, qui travaillait à coudre, assise sur sa porte.

« En Irlande, où c’était le matin, il paraissait aussi, à cette même minute de mort. Pâli davantage, on eût dit qu’il ne parvenait à être vu là que par une sorte de tour de force d’obliquité. Il rayonnait tristement, dans un fiord où dérivait la Marie, et son ciel était, cette fois, d’une de ces puretés hyperboréennes qui éveillent des idées de planètes refroidies n’ayant plus d’atmosphère. Avec une netteté glacée, il accentuait les détails de ce chaos de pierres qui est l’Islande ; tout ce pays, vu de la Marie, semblait plaqué sur un même plan et se tenir debout. Yann, qui était là, éclairé un peu étrangement aussi, lui, péchait comme d’habitude, au milieu de ces aspects lunaires.

« … Au moment où cette traînée de feu rouge, qui entrait par ce sabord de navire, s’éteignit, où le soleil équatorial disparut tout à fait dans les eaux dorées, on vit les yeux du petit-fils mourant se chavirer, se retourner vers le front comme pour disparaître dans la tête. Alors on abaissa dessus les paupières avec leurs longs cils, et Sylvestre redevint très beau et calme, comme un marbre couché6…… »

L’unité d’un roman pourra être plus lâche, ou plus idéale que l’unité d’une pièce de théâtre : celle-ci sera plus étroite et comme plus matérielle. Un épisode historique, comme la guerre de Jugurtha, n’aura pas la même unité qu’une histoire générale, comme l’ouvrage de Tite Live. Dans la nature, l’unité de l’individu n’est pas la même que l’unité du genre ou de l’espèce. En général, un long ouvrage admettra une plus grande diversité de parties et d’impressions secondaires qu’un ouvrage de courte étendue : dans vos compositions de collège, tant pour leur dimension que par votre inexpérience et par la nécessité de discipliner votre esprit, il ne faudra point vous écarter d’une assez rigoureuse simplicité. Tout devra être tendu vers l’unité : à vouloir trop combiner et trop nuancer, vous aboutiriez à la confusion et à l’indécision.

Ces parties qui s’accordent dans l’unité du tout ne sont point les matériaux inertes d’une construction immuable et fixe, ce sont les organes d’un corps mobile et vivant, assemblés pour l’action et pour une évolution sans arrêt qui les développe et les transforme. Le mouvement est aussi essentiel à tout ce qu’on écrit que l’unité : sans celle-ci, l’œuvre n’est pas ; sans celui-là, l’œuvre est morte. Si brève qu’elle soit, elle comporte un certain progrès, et le lecteur doit sentir à chaque minute qu’il fait un pas de plus vers la conclusion. Et comme, dans le mouvement général de l’univers, les êtres particuliers ont leur mouvement propre, ainsi, pour l’écrivain, tandis que l’ouvrage entier s’avancera vers sa fin, chaque partie accomplira son évolution particulière et aura son progrès propre. Partout où manque ce mouvement, la langueur, la froideur, l’ennui surgissent. Il est nécessaire dans un discours et une dissertation, dans un paragraphe de discours et de dissertation, tout autant que dans un roman ou une comédie, dans un chapitre de roman ou une scène de comédie. Les raisonnements de Démosthène courent d’une vive et dramatique allure, et se précipitent à leur conclusion, comme l’action d’Œdipe-roi marche à son dénouement. Sénèque, qui a de l’esprit et de l’imagination infiniment, lasse pourtant et ennuie souvent, faute de ce mouvement : il tâche d’en donner l’illusion, mais on sent qu’il s’agite et piétine sur place. Il arrête le lecteur en un endroit, et vingt fois lui met sous les yeux la même idée, diversement drapée et colorée : puis, d’un brusque saut, il se transporte dans une autre, où il nous arrêtera de même. Toutes ces idées se succèdent sans se tenir, elles ne s’amènent pas, ne s’engendrent pas, ne sortent pas les unes des autres. Ce n’est, pas la diversité continue d’un paysage qui se déroule aux yeux du voyageur, à mesure qu’il s’avance : ce sont les verres d’une lanterne magique, que l’opérateur présente successivement, et non pas si vite qu’il n’y ait entre les diverses vues un court moment où l’on ne voit rien. Quand il y a dans le discours un véritable mouvement, nulle part on n’aperçoit de solution de continuité : le développement s’achemine tout d’une suite à son but, comme, dans l’être vivant, chaque état du corps, chaque moment de la vie plongent dans l’état et dans le moment qui précèdent, et ne sauraient s’en distinguer : l’enfant devient homme insensiblement, et change en restant le même.

Pour assurer l’unité, et pour marquer le mouvement, il faut savoir où l’on doit commencer et où l’on doit finir. Toute action, toute démonstration ont un commencement, un milieu et une fin : toute œuvre qui racontera une action, ou développera un raisonnement, devra avoir un commencement, un milieu et une fin. Cela va de soi. Mais où prendre ce commencement ? Où fixer cette fin ? Voilà ce qu’il faut savoir résoudre, et cela ne laisse pas d’être souvent embarrassant. Dans les choses même qu’on croit le mieux connaître, si on veut les exposer, on ne sait souvent pas par quel bout les prendre. On les tâte de tous les côtés, on commence plusieurs fois ; cela ne va pas, on tire un fil, puis un autre, jusqu’à ce qu’on ait mis la main sur celui qui déroulera tout après lui.

Pascal, qui a fait une si profonde réflexion sur le travail de l’écrivain, et qui, là comme en toute chose, a vu plus nettement et plus loin que personne, a remarqué la peine que donne cette recherche nécessaire : « La dernière chose qu’on trouve en faisant un ouvrage est de savoir celle qu’il faut mettre la première. »

Et soit qu’on ait parlé, ou entendu les autres parler, n’a-t-on pas pu remarquer souvent comme il est difficile de finir ? On a beau savoir à fond la chose, et où elle se termine : on ne trouve pas l’idée et la phrase de la fin, celles qui doivent achever l’impression et conclure le discours ; on reprend son propos, on revient sur ses pas, on change un peu sa direction, sans pouvoir tomber juste au but.

Quand, ayant marqué votre point de départ, vous aurez aussi choisi le point d’arrivée, un grand pas sera fait : il ne s’agira plus que d’aller aussi droit que possible par la ligne qui les joint.

Dans ce trajet, la vitesse sera plus lente ou plus accélérée, selon le sujet et selon le lecteur. Quand les idées se succéderont, nombreuses et pressées, ne restant devant les yeux que le temps justement nécessaire pour en être bien reconnues et cédant la place à l’instant qu’on les a saisies, le mouvement sera vif, et le discours sera bref ; si chacune d’elles, au contraire, est retenue en scène, tournée et retournée sous tous ses aspects, le mouvement sera lent et le discours sera ample. Entre ces deux mouvements, il y a une infinité de degrés, selon qu’on précipitera plus ou moins le passage d’une idée à l’autre, selon qu’on s’arrêtera plus ou moins à considérer et à détailler chaque idée. Au-delà, sont deux défauts, deux excès, soit qu’on se hâte trop sans laisser le temps au lecteur de remarquer suffisamment les objets qu’on lui présente, soit qu’on s’attarde à lui montrer ce qu’il a bien vu d’un coup d’œil, à lui détailler ce qui n’en vaut pas la peine, à lui expliquer ce qu’il connaît. Un développement qui va trop vite, échappe ; un développement qui ne marche pas, ennuie.