Touche, [Claude Guymond de la] né en 1726, mort à Paris en 1760.
Une Epître à l'Amitié & quelques autres morceaux composent ses Poésies fugitives, qui plaisent à l'imagination, quoiqu'elles ne soient pas exemptes de défauts. Sa plus grande réputation vient de sa Tragédie d'Iphigénie en Tauride, Piece qui eut un grand succès, & restée au Théatre, malgré ses endroits foibles & même vicieux. L'amour en est exclu ; ce qui seroit une preuve du génie de l'Auteur pour le genre tragique, si les situations, qui sont quelquefois touchantes, étoient plus naturelles, plus vraisemblables, & la versification moins dure & moins hérissée. Il est difficile qu'une Tragédie soit bonne, avec des imperfections aussi marquées. Cependant le Public revoit avec plaisir celle-ci, parce que le sujet en est beau ; parce ce qu'il y a de l'action, une conduite assez réguliere ; parce que les sentimens en sont bien approfondis, & qu'il y regne en général un ton d'intérêt & de chaleur qui annonce de vrais talens La Scene d'Oreste & de Pylade est de la plus grande noblesse & du pathétique le plus attendrissant.
Ce jeune Poëte travailloit à une seconde Tragédie, lorsqu'une mort imprévue l'enleva au Théatre, où sa carriere auroit pu devenir plus glorieuse que celle de ses rivaux, pour peu qu'il eût eu le temps de perfectionner son génie.
Il ne faut pas le confondre avec un Auteur du même nom, à qui nous devons une excellente Grammaire, intitulée, l'Art de bien parler François. Ce M. de la Touche, qui vivoit encore au commencement de ce Siecle, n'a pas été assez heureux pour trouver place chez aucun de nos Lexicographes. Cet oubli vient sans doute de ce qu'il passa sa vie en Hollande, où il s'étoit réfugié après la révocation de l'Edit de Nantes. Son Livre n'a pas laissé d'avoir beaucoup d'Editions. Il est le meilleur qu'on puisse mettre entre les mains des Etrangers qui voudront se perfectionner dans notre Langue, à cause de l'attention qu'il a de relever les fautes particulieres à chaque Nation pour la maniere de la prononcer.