Parrocel
Il est de 8 pieds, 9 pouces.
L’Adoration des rois de Parocel est si faible, si faible, et d’invention et de dessin et de couleur. Parocel est à Vien, comme Vien est à Le Sueur. Vien est la moyenne proportionnelle aux deux autres. Mais dites-moi, mon ami, quand on a la composition d’un sujet par Rubens présente à l’imagination, comment on peut avoir le courage de tenter le même sujet. Il me semble▶ qu’un grand peintre qui a précédé est plus incommode pour ses successeurs qu’un grand littérateur pour nous. L’imagination me ◀semble plus tenace que la mémoire. J’ai les tableaux de Raphael plus présents que les vers de Corneille, que les beaux morceaux de Racine. Il y a des figures qui ne me quittent point. Je les vois. Elles me suivent. Elles m’obsèdent. Par exemple, un certain Saint Barnabé qui déchire ses vêtements sur sa poitrine ; et tant d’autres. Comment ferais-je pour écarter ces spectres-là ? et comment les peintres font-ils ? il y a dans l’Adoration de Parocel un coussin qui me choque étrangement. Dites-moi, s’il vous plaît, comment un coussin de couleur a pu se trouver dans une étable, où la misère nous réfugie, et où l’haleine de deux animaux réchauffe un nouveau-né contre la rigueur de la saison. Les artistes sont tellement aux beautés techniques, qu’ils négligent toutes ces impertinences-là dans le jugement qu’ils portent d’une production. Faudra-t-il que nous les imitions ? et pourvu que les ombres et les lumières soient bien entendues, que le dessin soit pur, que la couleur soit vraie, que les caractères soient beaux, serons-nous satisfaits ?