Payen, Louis (1875-1927)
[Bibliographie]
Vers la vie (1898). — Tiphaine, épisode dramatique, musique de V. Neuville (1899). — À l’ombre du Portique, poèmes (1900). — Persée, poème (1901).
OPINIONS.
Edmond Pilon
M. Louis Payen ordonne ses poèmes avec un beau luxe et chacune de ses strophes se déroule avec l’heureuse ondulation de la mer. Il est fait pour chanter la luxure, les fruits qu’on cueille à l’automne et les instants où la mort, aussi belle que l’amour, se confond avec lui. Son poème sur Antinoüs est peut-être, dans ce sens, le meilleur qu’il ait donné.
Émile Faguet
M. Louis Payen vise à la
forme « spacieuse et marmoréenne »
, et très souvent il y atteint.
Je ne serais pas étonné qu’il allât très loin dans une voie qui malheureusement
est trop connue et qui n’est vraiment glorieuse que pour ceux qui 1 ont ouverte ou
qui l’ont retrouvée après un long oubli. Tout coup vaille ; et la beauté de la
forme vaut par elle-même. Il est donné à peu près à tout le monde de concevoir le
poème de Jason ; il n’est donné qu’a un très petit nombre de
l’écrire comme M. Payen.
Et je goûte encore plus le court poème Sur la mer. Il me semble▶ que la grande impression de solitude infinie a trouvé ici sa vraie forme, ou tout au moins une forme qui l’exprime approximativement encore, mais presque aussi fidèlement que possible.
… M. Louis Payen a le sens poétique. Il est doué. Je lui souhaite bon voyage au pays des sirènes et belles rêveries à l’ombre du Portique.
Edward Sansot-Orland
Ce n’est ni dans l’éclat des midis embrasés, ni dans les lignes nettes des horizons classiques que M. Louis Payen aime à évoquer les mythes familiers à tant de lyres surannées. Les rayons d’Hélios offusquent ses regards, son âme s’intimide des nudités diurnes et ne s’épanouit, ◀semble-t▶-il, qu’à travers les fraîcheurs de la nuit ou de crépusculaires décors. Les dieux et les héros n’évoluent pour lui que dans le vague des pénombres, et ce n’est que sous les voiles de Cypris qu’il ose entrevoir les étreintes des courtisans et des éphèbes. Très rares, en effet, sont les poèmes de ce beau recueil où le décor essentiel ne s’estompe de nuiton de crépuscule. On songe, en le lisant, à un Carrière poète. Sans doute, ce n’est point sous de tels aspects de mélancolie qu’un païen véritable pouvait concevoir les divines légendes, ce sont là plutôt des nostalgies païennes, comme aurait pu en évoquer un cerveau chrétien du ve siècle dans les pénombres attristées des cryptes romanes. Est-ce là une critique ? Non, mais plutôt un éloge, car la personnalité du poète ressort plus grande d’une telle vision. Et ce n’est pas encore assez pour M. Payen, car, à défaut d’autre mérite, il aurait celui de connaître à fond son métier de poète. Nul n’a mieux que lui le don des beaux vers.
Stuart Merrill
Le premier recueil de M. Louis Payen, À l’ombre du Portique, est le gage de belles œuvres à venir. Un admirable poète s’y annonce, je ne crains pas de l’affirmer. Aucun jeune homme ne m’a davantage étonné par la sûreté précoce de son métier. Et me voici réduit à ne pas trouver de défauts dans un livre où, pourtant, nulle difficulté de langage ni de métrique n’est éludée. M. Louis Payen a vraiment tous les dons que la plupart des poètes n’acquièrent qu’après un pénible apprentissage.
… Il me ◀semble dans certains poèmes sentir la fugace influence d’André Chénier, d’Albert Samain ou d’Henri de Régnier. Mais peut-être la similarité des sujets entraine-t-elle celle de l’expression. Toujours est-il que cette critique, que je formule à peine, s’évanouit devant la série de poèmes intitulés « Dialogues dans l’ombre ». Une âme passionnée, sensible et païenne s’y débat contre ce que les aïeux lui ont légué de religieux, de mystique et de contraint. Voici vraiment souffrir et se plaindre un poète.