(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 434-435
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(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 434-435

1. Camus, [Jean-Pierre] Evêque de Belley, ami intime de S. François de Sales, né à Paris en 1582, mort dans la même ville en 1652.

On a de lui une grande quantité de Sermons qui édifierent peut-être de son temps, mais qui feroient rire aujourd’hui, par le ton burlesque qui les caractérise, & par les citations fréquentes & déplacées des Poëtes & des Auteurs profanes. Il s’y permet des traits contre les Moines, qui n’eurent jamais de plus grand ennemi. Guillaume de S. Amour fut son modele à cet égard, & l’on sait combien il l’a surpassé.

Il a fait beaucoup de Romans qui semblent n’avoir pour objet que l’amusement du cœur & de l’esprit, mais dont le but est réellement l’instruction & la piété. Son zele lui inspira cet artifice, pour dégoûter des lecteurs dangereuses ; exemple suivi de nos jours par un Pere Marin, Minime, à qui on eût souhaité, pour le succès de la bonne œuvre, plus de connoissance du monde & moins de prolixité, quoiqu’on doive lui savoir un très-grand gré de ses bonnes intentions. Les Romans spirituels de l’Evêque de Belley eurent un succès qui tenoit à la fureur. Les Moines seuls s’en plaignirent. Ils avoient raison, car on ne pouvoit les traiter plus durement. Sur leur plainte, le Cardinal de Richelieu en fit des reproches à l’Auteur. « Je ne trouve d’autre défaut en vous, lui dit-il, que cet horrible acharnement contre les Moines, sans cela je vous canoniserois ». Plût à Dieu que cela fût possible, lui répondit l’Evêque, nous aurions l’un & l’autre ce que nous souhaitons.

Ce n’étoit pas répondre à ce reproche ; aussi le jugement & la justesse d’esprit n’étoient pas le partage du Critique. Il en convient lui-même, dans son Livre intitulé l’Esprit de S. François de Sales, Ouvrage où la Philosophie est aimable, autant que la Religion s’y fait respecter. S. François de Sales disoit, à ce sujet, qu’il n’avoit trouvé personne assez sincere pour faire un pareil aveu ; le jugement, ajouta-t-il, est une piece de laquelle ceux qui en manquent davantage pensent en être mieux fournis.