LUNEAU DE BOISJERMAIN, [Pierre-Joseph-François] né dans le Diocese de Bourges, en 173..
Avant son procès contre les Libraires, sa célébrité étoit resserrée dans un cercle assez obscur. Une édition de Racine, avec un Commentaire, formé de diverses Observations, dont peu lui appartiennent ; un Recueil, sous le titre d’Elite de Poésies fugitives, qui n’est, à peu de chose près, qu’une répétition des autres Recueils ; un Cours d’Histoire & de Géographie, où il n’y a rien de neuf, & qui est très-mal écrit ; ne sembloient pas annoncer les talens qu’il a développés, lorsqu’il s’est agi de se défendre lui-même. On peut lui appliquer, à cet égard, ce mot de l’Ecriture, vexatio dat intellectum. En effet, rien de plus vif, de plus solide & de mieux écrit, que les Mémoires qu’il a composés pour cette affaire. Ils contiennent, entre autres, une Réfutation d’une Lettre de M. Diderot, qui se réfutoit, à la vérité, d’elle-même par son extravagance & le délire philosophique qui y regne d’un bout à l’autre ; mais la Réfutation de M. Luneau ne donne pas moins l’idée la plus favorable de son esprit & de son jugement.
Les Gens de Lettres doivent lui savoir gré de les avoir si complétement vengés, dans ses Plaidoyers & ses Mémoires, de l’oppression de ces tyrans typographiques qu’ils font vivre par leur esprit. Les Auteurs ne rougiront-ils pas de supporter si patiemment un joug si semblable à celui que les Spartiates imposerent autrefois aux Ilotes, qui ne cultivoient la terre que pour leur abandonner la moisson ?