(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 248-249
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(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 248-249

Saumaise, [Claude de] né à Semur, en Auxois, en 1588, mort à Spa en 1653.

Ce nom est consacré depuis longtemps pour donner l'idée d'un insipide Auteur. Ce n'est pas que Saumaise n'eût des talens, mais il a trop écrit, & par cette raison trop mal écrit, pour que les défauts de ses Ouvrages méritent quelque indulgence, en faveur des bonnes choses qu'on peut y rencontrer. Cet Auteur, devenu Protestant, de Catholique qu'il étoit, se laissa dominer par un orgueil farouche, toujours prêt à s'aigrir à la moindre contradiction. Dès qu'on n'étoit pas de son avis sur quelque point de Littérature ou de Religion, aussi-tôt on étoit sûr d'être traité d'ignorant, de bête, de fripon. C'est vraisemblablement dans cet Ecrivain attrabilaire, que M. de Voltaire, entre autres choses, a puisé les Epithetes honorables qu'il prodiguoit à tous ceux qui osoient contredire ses décisions. Quoi qu'il en soit, Saumaise rencontra dans le P. Peteau un homme qui sut lui rendre injures pour injures, en les accompagnant toutefois de meilleurs raisons. Cette maniere de disputer pouvoit être excusable dans un temps où l'on n'avoit pas encore dit : « Il est bien cruel, bien honteux pour l'Esprit humain, que la Littérature soit infectée de ces haines personnelles, de ces cabales, de ces intrigues, qui devroient être le partage des esclaves de la fortune. Que gagnent les Auteurs en se déchirant cruellement ? Ils avilissent une possession qu'il ne tient qu'à eux de rendre respectable. Faut-il que l'art de penser, le plus beau partage des Hommes, devienne une source de ridicule, & que les Gens d'esprit, rendus souvent, par leurs querelles, le jouet des sots, soient les bouffons du Public, dont ils devroient être les Maîtres » ? Préface d'Alzire.