(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 120-121
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(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 120-121

Rollin, [Charles] Recteur de l'Université, Professeur d'Eloquence au Collége Royal, de l'Académie des Inscriptions, né à Paris en 1661, mort dans la même ville en 1741 ; le plus grand Littérateur, & un des meilleurs Ecrivains qu'ait produits l'Université.

Son Traité des Etudes, plein de réflexions justes, délicates & solides, est le Livre le plus propre que nous connoissions à inspirer l'amour de la vertu & le goût des Lettres. Cet Ouvrage est devenu classique. Il le méritoit. Tout y est puisé dans les bonnes sources, tout y est senti, tout y est présenté & développé avec adresse & netteté. C'est ainsi qu'il est permis aux Modernes de s'enrichir des dépouilles des Anciens ; ce sont des richesses étrangeres qu'ils transplantent pour l'utilité publique ; & l'on a droit de devenir Législateur, quand on a pour garans les Oracles du vrai goût & de la saine raison.

« L'Histoire ancienne de M. Rollin, dit avec vérité M. de Voltaire, est la meilleure Compilation qu'on ait en aucune Langue, parce que les Compilateurs sont rarement éloquens, & que Rollin l'étoit ». Cette Histoire est en effet écrite avec pureté, avec noblesse, & de ce ton sensible & communicatif, qui fait passer, avec l'instruction, l'amour de l'objet qu'on présente. On y désireroit seulement plus de critique. L'Auteur n'a pas su toujours distinguer le vrai d'avec le faux, l'intéressant d'avec l'inutile, l'abondance du style d'avec la prolixité toujours ennemie du genre historique. On peut en dire autant de l'Histoire Romaine, poussée jusqu'à la fin de la République, avec cette différence que dans celle-ci l'Historien est plus judicieux, moins diffus, & plus animé.

Les défauts qu'on a reprochés à M. Rollin n'empêcheront pas qu'il ne soit placé, par les justes appréciateurs du vrai mérite, au nombre de nos Littérateurs les plus estimables. Quand on a consacré ses travaux à l'instruction de la Jeunesse, formé des Disciples à l'amour de l'étude, de la Religion & de la Patrie, on a des droits assurés à la reconnoissance des Gens de Lettres & des bons Citoyens. Quel objet plus intéressant peut se procurer tout homme qui écrit !